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Sans transition. Une nouvelle histoire de l’énergie, de Jean-Baptiste Fressoz

Sans transition. Une nouvelle histoire de l’énergie
de Jean-Baptiste Fressoz
Seuil, 416 p., 24 €

Comme on l’apprend à l’école, vous pensiez sans doute que les différentes révolutions industrielles réalisées par le capitalisme avaient, en dépit des tares de celui-ci, permis néanmoins des transitions successives d’une énergie à l’autre : du bois au charbon, du charbon au pétrole… puis au renouvelable généralisé.

Eh bien non. Fressoz, faits et documents à l’appui1, montre que ces transitions sont imaginaires et que, au contraire, il y a eu accumulation (« symbiotique », dit-il) des différentes matières premières. Prouesses technologiques sans doute, mais effets rebonds, et énorme accumulation de toutes les énergies fossiles au bout de 200 ans d’accumulation capitaliste. Pour résumer : « L’humanité n’a jamais brûlé autant de pétrole et de gaz, autant de charbon et même autant de bois. »

Plus qu’une « nouvelle histoire de l’énergie », cet essai très documenté est une « histoire matérialiste » du capitalisme. Et quelle histoire ! Autre diagnostic très bien formulé par l’auteur : ladite transition énergétique « est l’idéologie du capital au XXIe siècle. Grâce à elle, le mal devient le remède… ».

Un livre vertigineux dont, pourrait-on espérer, le greenwashing ne pourrait se remettre.

3 mars 2024, H.C.

 

 

(Article paru dans Révolutionnaires numéro 11, mars 2024.)

 

 

1  Jean-Baptiste Fressoz est un historien des sciences, des techniques et de l’environnement, par ailleurs proche des milieux « décroissants », tout en sachant que la galaxie décroissante est vaste. En tout cas, dans ce livre, il s’en tient aux faits, sans délibérément proposer de solution. Mais, comme historien et scientifique lanceur d’alerte, c’est très efficace.