13 juin 2025 : Trump parle de diplomatie pour faire renoncer le régime iranien à l’arme nucléaire, tout en apportant à l’offensive guerrière d’Israël contre l’Iran toute la logistique guerrière américaine. Nuit du 22 au 23 juin 2025 : Trump décide l’entrée en guerre des États-Unis contre l’Iran : une armada volante de bombardiers B2, soutenue par des tirs de missiles de croisière lancés d’un sous-marin, largue des bombes dites « antibunker » sur des sites du programme nucléaire iranien. Soirée du 23 juin 2025 : Trump annonce de son propre et seul chef un cessez-le-feu entre l’Iran et Israël, avec une formule on ne peut plus cynique : « Félicitations à tout le monde ! » Qu’en sera-t-il de cette énième promesse de prétendue paix dans le monde d’un Trump, à la tête de l’impérialisme le plus puissant et le plus belliqueux ? C’est encore à voir. Mais sont déjà tout vus, les dégâts humains et matériels de cette offensive impérialiste américaine contre l’Iran.
L’apparence d’atermoiements et volte-face
Il est beaucoup glosé sur l’imprévisibilité de Trump. Il y a pourtant un très vieux projet de l’impérialisme américain dans lequel Trump s’inscrit, de soutien inconditionnel à l’État d’Israël pour en faire son bras armé contre les révoltes des classes populaires palestiniennes ou arabes de la région. C’est vrai depuis la création de l’État sioniste en 1948. Voilà des années qu’Israël est le pays le plus fourni au monde en armement américain, en hausse notable depuis l’offensive contre Gaza en octobre 2023. Et que s’est-il passé depuis un an et demi, dans un contexte où les rivalités inter-impérialistes s’exacerbent et où l’impérialisme américain dominant veut conserver son rang face à des concurrents qui menacent ses marchés et ses profits ? Au nom de son droit à se défendre face au Hamas, Israël a fait près de 60 000 morts à Gaza et d’innombrables blessés ou disparus, quasiment détruit ce petit territoire palestinien et affamé ses habitants. Puis Israël s’est attaqué au Liban, pour y réduire – là encore sous des bombardements mortifères – l’influence d’un Hezbollah (allié à l’Iran) faisant pourtant partie de l’establishment politique du pays. Puis Israël a profité de la chute du régime d’Assad, en partie liée au retrait du pays des troupes du Hezbollah qui l’épaulaient, et de la fragilité du nouveau pouvoir, pour quasiment annihiler sous les bombes le potentiel militaire de la Syrie. Les impérialistes américains (avec l’aide des impérialismes anglais et français) ont bombardé les Houthis du Yémen (eux aussi alliés de l’Iran). Restait le cœur du réacteur, le régime iranien lui-même, vieil ennemi déclaré de l’impérialisme américain traité de « grand Satan », un régime qui n’a montré des dents que pour gagner sa place dans l’ordre impérialiste et a défendu les intérêts d’une bourgeoisie puissante, précisément en réprimant sauvagement et pour le compte de cette bourgeoisie toute organisation et lutte d’un prolétariat nombreux et combatif. Trump voudrait probablement retrouver ce temps béni d’avant la révolution iranienne de 1978 (récupérée ensuite par la dictature islamiste), où un tyran sanguinaire – le shah d’Iran dont le fiston brigue aujourd’hui la place ! – était tout à la dévotion des intérêts économiques et politiques de l’impérialisme américain dans la région.
Les impérialistes craignent l’instabilité ? Heureusement !
À coup sûr, aujourd’hui le régime des mollahs est affaibli. Jusqu’à rentrer dans le rang face à l’impérialisme américain et sa filiale israélienne ? De nouveaux rounds de cette guerre sans fin de l’impérialisme sont devant nous. Ces deux ans et demi d’offensive israélo-américaine dans cette vaste région du Moyen-Orient (avec la complicité des puissances impérialistes européennes dont la France) ont probablement réussi à mettre au pas, sous les bombes ou leur menace, des puissances régionales rivales. L’escalade n’a pas épargné les civils mais grand soin a été pris de ne pas perturber le commerce mondial ! L’Iran n’a pas cherché à bloquer le détroit d’Ormuz… vers lequel « Tous les regards s’étaient tournés », écrit Le Monde ! Eh oui, parce qu’« y transite chaque jour un cinquième de la production mondiale de pétrole et de gaz naturel liquéfié ».
Les enjeux économiques de la région ne se limitent pas aux énergies fossiles. Des rivalités pour le commerce des armes s’y jouent (voir comment Macron se balade en Égypte, en Arabie saoudite et autres émirats pour vendre ses Rafale), de même que pour le nucléaire civil où les États-Unis rivalisent avec la Russie.
Reste que l’offensive guerrière israélienne lancée à l’occasion de l’attaque du Hamas d’octobre 2023 a intentionnellement terrorisé sous les bombes les classes populaires de la région. Les dirigeants du monde impérialiste, de Trump à Poutine en passant par Macron, ne les perdent jamais de vue. La vaste région du Moyen-Orient compte un énorme potentiel de travailleurs et de jeunes qui ont montré depuis une quinzaine d’années qu’ils pouvaient se révolter jusqu’à abattre des régimes comme des châteaux de cartes. On l’a vu avec les printemps arabes, même si la contre-révolution ensuite a fait son œuvre. On l’a vu en Iran, en 2017 et 2022-2023.
Cela reste leur cauchemar, et cela reste l’espoir révolutionnaire.
Michelle Verdier, 24 juin 2025