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Turquie : alors que les manifestations s’essoufflent, Erdoğan reprend l’offensive

Manifestation contre l’arrestation du maire d’Istanbul, 21 mars 2025

Mercredi 2 juillet à l’aube, alors que de nombreux incendies ont obligé plus de 50 000 personnes à évacuer leur domicile, Erdoğan a repris son offensive contre le Parti républicain du peuple (CHP) en arrêtant des centaines d’élus oppositionnels pour « corruption ».

Près de quatre mois après l’arrestation d’Ekrem İmamoğlu, le maire CHP d’Istanbul, Erdoğan profite de l’affaiblissement des mobilisations de rue pour s’efforcer de briser sa principale opposition électorale. Les juges du régime cherchent à invalider les résultats du congrès de 2023 tenu par le CHP : cela reviendrait à remplacer la présidence actuelle du parti par son ancien dirigeant, Kılıçdaroğlu (détesté par la population) ou par un « administrateur provisoire d’État ». De quoi provoquer des divisions au sein du CHP, au risque de le faire éclater et débarrasser Erdoğan de son principal rival.

Une opposition désorientée

Des manifestations se sont tenues dans différentes villes pour protester contre les arrestations d’élus du CHP, sans que celles-ci relancent une vague de mobilisation. La faute aux vacances universitaires qui ont vidé les universités, fer de lance de la contestation ? Ou conséquence de la politique du CHP, qui a restreint le mouvement à l’unique défense d’İmamoğlu, alors que des grèves sectorielles éclatent partout dans le pays pour l’augmentation des salaires ? Grèves auxquelles le CHP s’est parfois violemment opposé… notamment à Izmir, en mai dernier.

Parallèlement, Erdoğan et les dirigeants du DEM (parti légal d’opposition kurde) annoncent la destruction prochaine d’un stock symbolique d’armes du PKK (Parti des travailleurs kurdes), considéré par le régime comme terroriste et dont le principal dirigeant, Abdullah Öcalan, emprisonné depuis 1999, a annoncé, de sa prison, en mai dernier la dissolution, dans le cadre du « processus de paix » engagé le 1er mars dernier avec le régime1. Une manière pour Erdoğan de diviser l’opposition au régime, en vue de réaliser son projet de refonte constitutionnelle qui lui permettrait de se présenter pour un nouveau mandat présidentiel…

8 juillet 2025, Stefan Ino

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1  Un processus de « paix » bien particulier, alors que l’armée turque continue de bombarder les bases militaires du PKK en Irak. Pas étonnant donc que le PKK juge que « la Turquie n’a pas fait sa part ».