
« Un effort jamais vu depuis vingt-cinq ans », a proclamé Bayrou à propos du budget de l’État 2025, finalement adopté à coup « de 49.3 » début février. Macronistes, droite, RN et PS se sont entendus pour faire payer une austérité record aux classes populaires. Réduire le « déficit public » de 50 milliards d’euros – après un cumul en 2023 et 2024 de 70 milliards de trous dans les comptes publics, par largesse délibérée envers les entreprises du CAC 40 et des milliardaires – vaut bien, à leurs yeux, le sacrifice des services publics essentiels à la population (−24 milliards), des collectivités territoriales (−2 milliards) et de la Sécurité sociale (−8 milliards).
Alors qu’il y a plus de 4,2 millions de personnes mal logées, que la liste des demandeurs et demandeuses de HLM bat tous les records (2,7 millions contre 2,1 millions en 2021), les crédits alloués au logement sont réduits de 850 millions d’euros. Dans l’Éducation nationale, et malgré l’annulation de la suppression des 4 000 postes d’enseignants prévue par Barnier (et l’autosatisfaction ridicule du PS à ce sujet), les montants alloués, en tenant compte de l’inflation, sont réduits de 1,2 milliard d’euros. Une coupe sensible. Côté recherche et enseignement supérieur, la baisse est similaire (−1,3 milliard), ce qui provoque d’ores et déjà des désastres dans les budgets des universités et la colère et la mobilisation des membres du personnel et des étudiants.
En pleine remontée du chômage, le gouvernement a la riche idée de réduire de 4,4 milliards d’euros le budget alloué au travail et à l’emploi. C’est la coupe la plus importante de ce budget 2025. Plus de 40 % du budget des emplois aidés est notamment raboté.
La culture est elle aussi sacrifiée : les montants alloués au patrimoine chutent de 200 millions d’euros, la « transmission des savoirs et la démocratisation de la culture » perd 20 millions d’euros, et le pass Culture voit son budget chuter de 97 à 72 millions d’euros1. L’écologie, le sport, l’audiovisuel public, l’aide au développement sont également passés à la moulinette des économies. Près de 800 millions d’euros vont être économisés sur le dos de la santé des fonctionnaires et des agents contractuels du secteur public, avec la baisse de leur indemnisation en cas d’arrêt maladie à 90 % au lieu de 100 %. Les cotisations des complémentaires santé (qui couvrent 96 % de la population) vont augmenter.
Les seuls ministères qui voient leur budget augmenter sont l’armée, la police et la justice. Tout un programme.
Côté recettes, les entreprises réalisant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires, notamment, vont voir le taux d’imposition sur leurs bénéfices exceptionnellement grimper de 25 à 30 %, et celles gagnant plus de 3 milliards, de 25 à 35 %. Si la mesure doit rapporter seulement 8 milliards d’euros aux caisses de l’État en 2025, elle a suffi à faire hurler à la mort le PDG du groupe de luxe LVMH, Bernard Arnault, qui a menacé de délocaliser ses activités aux États-Unis. Mais qu’il se rassure : le ministre de l’Économie et des finances, Éric Lombard, a d’ores et déjà indiqué que cette hausse du taux d’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises ne s’appliquerait qu’en 2025. Ouf ! Les riches peuvent respirer. En attendant, ce sont tous les autres qui risquent l’asphyxie.
Marie Darouen
1 Voir sur notre site : « Éducation nationale : le ministère coupe à la hache dans la culture », Aurélien Pérenna, 2 février 2025