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Une grève pour l’emploi à l’usine Bosch du Calvados

Mondeville, lundi 4 mars : sixième jour de grève aujourd’hui pour les salariés de Bosch. Cent postes viennent tout juste d’être supprimés sous la forme de départs en pré-retraite. L’avenir des 400 salariés restants et de leur famille est tout à fait incertain puisque le groupe veut se débarrasser de l’usine.

Réorganisation du secteur automobile et luttes pour l’emploi

Au prétexte d’une réorganisation du secteur de l’automobile et de la fin des moteurs thermiques, année après année Bosch met dehors les salariés, comme à Vénissieux, Drancy, Rodez ou Barcelone. À Mondeville, à côté de Caen, c’est toute l’usine qui risque de fermer. En moins de 15 ans, 900 salariés ont déjà perdu leur emploi sur départs volontaires. La production s’est diversifiée avec à présent 50 % de production de pièces détachées pour l’automobile, et 50 % de sous-traitance électronique, notamment dans les enceintes. Mais le groupe, qui pourtant se porte bien à l’échelle mondiale avec des bénéfices qui ont augmenté par rapport à l’année dernière, cherche encore à accroitre ses profits au détriment de la vie des salariés. À Mondeville, la moyenne d’âge est de 53 ans, avec des décennies de bons et loyaux services pour Bosch : bonjour la reconnaissance ! Quand on connaît le taux d’emploi, surtout des plus de 55 ans, fermer l’usine, c’est condamner les travailleurs à la précarité et au chômage. À l’annonce du plan de licenciement étalé sur 2024 en septembre dernier, la direction s’était voulue rassurante : plusieurs années de pré-retraite pour les plus âgés et deux ans de congé de reclassement pour les autres. Début 2024, le cabinet de conseil Roland Berger a annoncé deux repreneurs potentiels : Mutares et Telma, projet qui a mis en grève 80 % de l’usine toute la semaine dernière.

Des repreneurs qui ne convainquent pas et poussent les salariés à la grève

Si les salariés sont prêts à une réorganisation de la production, ils tiennent néanmoins à pérenniser les 400 emplois restants et refusent de brader leurs conditions de travail ou de céder aux chantages à la délocalisation. Or, les deux repreneurs annoncés par Bosch ont entraîné crainte et colère. Telma est leader mondial des freins à induction. Problème : il n’a pas encore les fonds nécessaires pour une reprise pérenne du site. Mutares, le deuxième repreneur proposé par Bosch, est un fonds de « retournement » allemand qui a déjà fait la preuve de sa rapacité dans d’autres entreprises comme Valti dans la métallurgie, Lapeyre dans l’ameublement ou Artmadis, grossiste en arts de la table. Les salariés craignent que son rachat vise ensuite à faire du profit en dégradant les conditions de travail et en les poussant à la démission, sans aucune garantie sur la survie de l’usine, comme il l’a fait ailleurs. La filiale Artmadis avait été rachetée en 2012 par Mutares avant d’être liquidée avec ses 200 emplois en 2018, sans solution de reclassement. En 2022, quatre mois après le rachat de Valti par Mutares, les salariés en grève expliquaient déjà : « Nous comptons une vingtaine de démissions non remplacées, une dégradation des conditions de travail, un non-respect des salariés et une polyvalence à outrance. À cela se rajoute la dénonciation de tous les accords, de tous les acquis sociaux et une volonté de réduire de 20 % la masse salariale. »

Une sauce à laquelle les salariés de Bosch refusent d’être mangés, qui les a conduits à se mettre massivement en grève et à arrêter totalement la production pendant une semaine, se relayant nuit et jour sur le piquet de grève.

Lundi 4 mars, Mutares a été exclu des négociations pour la reprise du site. Une demi-victoire pour les grévistes qui ont décidé en AG d’arrêter le mouvement.

Un mouvement du secteur automobile à construire

Rien ne garantit l’avenir de ces salariés et tout le monde sur place en est bien conscient, y compris l’intersyndicale CFTC, CFE-CGC, CDFT et Sud. Ce n’est pas la première bataille des salariés de Bosch et ce ne sera pas la dernière. Pourtant, dans ce mouvement, ils n’ont pas bougé ailleurs qu’à Mondeville et l’intersyndicale n’a pas cherché à interpeller les autres sites. Les grèves qui se succèdent chez Bosch et plus généralement dans l’automobile depuis quelques années restent localisées et ne suffisent pas à enrayer le rouleau compresseur des suppressions de postes. Alors que l’État arrose l’automobile de subventions, la crise sanitaire et le prétexte de la transition écologique – très discutable en ce qui concerne les moteurs électriques – ont donné lieu à de nombreuses restructurations et dégraissages sur le dos des travailleurs. Travailler moins pour le même salaire ? Il n’en est pas question pour les patrons. À l’usine Bosch de Rodez, un accord a été signé en 2021 pour la suppression de 750 postes sous la pression du chantage à la survie de l’usine. Site par site, la lutte pour l’emploi s’annonce perdue d’avance, même pour des reclassements dont les promesses visent surtout à calmer les ripostes. Rien ne garantit ainsi qu’un repreneur comme Telma, qui a un projet industriel cher à l’intersyndicale, pourra pérenniser les 400 emplois. Cette division qui fait pour l’instant les affaires du patronat dans l’automobile, sa sous-traitance et ailleurs, n’est pourtant pas une fatalité pour les travailleurs qui se battent contre les licenciements et pour la répartition du travail.

Correspondante