C’est donc au détour de sa déclaration de politique générale le 1er octobre que Barnier a annoncé l’abandon définitif de la réforme constitutionnelle enfantée par Macron et qui devait élargir le corps électoral pour rendre les Kanak encore plus minoritaires sur leurs propres terres. Macron avait déjà été obligé de la suspendre au moment de la dissolution en juin, mais c’est surtout la révolte massive de la population kanak depuis le 13 mai, à l’annonce de la ratification prochaine par le Congrès de cette réforme électorale, qui a fait mettre un genou à terre à Macron.
C’est donc une vraie volte-face de l’exécutif, qui annonce aussi le report d’un an des élections provinciales qui devaient se tenir à la fin de l’année 2024. Le repas pris à l’Élysée quelques heures avant la déclaration de Barnier par le député loyaliste d’extrême droite Nicolas Metzdorf, qui siège dans les rangs des macronistes, a dû lui rester en travers de la gorge à tel point qu’il a éructé durant quelques jours qu’il voterait la motion de censure du gouvernement déposée par la gauche la semaine suivante. C’est un coup dur pour le camp colonial effectivement.
Mais le prix à payer est lourd : ce sont au moins 13 morts dans la population kanak, les centaines de condamnations expéditives de jeunes arrêtés sur les barrages, les dizaines de déportations en métropole de prisonniers politiques (dont plusieurs leaders de la CCAT), l’état d’urgence toujours en vigueur (au moins encore jusqu’au 21 octobre) et des conditions de vie encore plus dégradées pour les populations les plus pauvres de l’archipel.
C’est l’État français qui a mis encore une fois le feu à la Kanaky. La moindre des choses serait qu’il libère immédiatement tous les prisonniers encore en détention préventive et qu’il amnistie tous les condamnés depuis le 13 mai. Quant à l’obtention de la vérité et de la justice pour les jeunes Kanak assassinés par les gendarmes et les milices loyalistes, elle ne pourra venir que sous la pression de la mobilisation là-bas et ici, en métropole. En Kanaky, il doit vraiment finir le temps des colonies !
Marie Darouen