Paris 1793-1794, une année révolutionnaire, exposition
Musée Carnavalet-Histoire de Paris, jusqu’au 16 février 2025, entrée 13 €
Voilà une exposition dont l’intérêt réside aussi bien dans l’approche et les objets proposés que dans les réactions outrées d’un certain public – « mais c’est une exposition pour les communistes ! », a-t-on pu entendre en la visitant.
Cette exposition, c’est celle qui vient d’ouvrir au musée Carnavalet, au cœur du quartier du Marais à Paris : Paris 1793-1794, une année révolutionnaire. L’heure enfin venue pour le petit peuple de se réapproprier les beaux quartiers ? À la condition que ce petit peuple puisse s’acquitter de la modique somme de… 13 euros quand même.
Alors, pourquoi autant de polémique ? Cette exposition retrace cet an II de la République, de septembre 93 à septembre 94, communément désigné sous le nom de « Terreur ». Mais il s’agit surtout de sortir de la mystification qui entoure cette année. On y découvre alors les grands événements organisés pour célébrer la prise des Tuileries du 10 août 1792 (c’est-à-dire l’arrestation du roi qui avait jusque-là échappé à la colère populaire), lors de la fête de la Réunion du 10 août 1793, les obsèques grandioses de Marat (figure révolutionnaire majeure, assassiné à son domicile), les mesures prises dans les domaines de l’éducation, l’ouverture du musée du Louvre pour la première fois au grand public, l’élaboration d’une culture commune autour de l’unification des poids et mesures ou encore de « l’être suprême »… L’exposition ne passe pas sous silence la répression puisqu’on y découvre les certificats de civisme, les obligations vestimentaires, les prisons, les condamnations comme celle d’Olympe de Gouges, ainsi que les destructions d’objets ayant trait à la monarchie.
Alors qu’est-ce qui est à ce point insupportable pour les réactionnaires d’aujourd’hui ? Peut-être la présentation de la Constitution de 1793, et de sa Déclaration des droits, qualifiée de « la plus démocratique que la France n’ait jamais eue » avec la proclamation du droit à l’existence et donc à la subsistance. À moins que ce ne soit l’intervention vidéo de l’historien Guillaume Mazeau qui explique comment le concept de « Terreur » a été inventé après coup par ceux qui ont voulu faire reposer l’entièreté du massacre sur les épaules de Robespierre pour mieux se dédouaner sur leur propre responsabilité.
Les analyses des historiens sur cette période ne sont pas nouvelles, mais il est assez impressionnant de voir comment certains commentaires (sur le Facebook du musée Carnavalet) parlent de « négationnisme » (assimilé au communisme !) pour qualifier ce point de vue. Une réaction à la mesure du mythe élaboré juste après la mort de Robespierre et utilisé jusqu’à aujourd’hui pour disqualifier les révolutions.
Alors, non, « Paris 1793-1794, une année révolutionnaire » n’est pas une exposition « communiste ». Mais elle a le souci de rétablir une vérité historique au-delà des fantasmes… et cela suffit à déchaîner les passions… et peut-être même à nous encourager à aller la voir.
Andréa Martin