Consacrer 5 % du PIB aux dépenses militaires – ce qui est l’objectif que se sont fixés les pays de l’Otan – ne date pas d’hier : la guerre froide entre les États impérialistes et l’URSS a déclenché une course aux armements qui a duré plusieurs décennies, de la fin de la Deuxième Guerre mondiale à la fin des années 1980. En France, les budgets militaires ont dépassé 5 % du PIB de 1950 à 19621. Aux États-Unis, ils ont culminé à 9,42 % en 19672 et sont restés au-dessus de 5 % jusqu’en 1990, c’est-à-dire jusqu’à la disparition de l’URSS.
Que cette période d’investissements massifs des États dans de véritables budgets de guerre coïncide pratiquement avec les années de forte croissance – ce qu’on a appelé les Trente Glorieuses, de 1945 à 1975 – n’est évidemment pas un hasard. L’expression « complexe militaro-industriel », pour reprendre les mots du président américain Eisenhower, désigne les liens étroits qui les unissent au personnel politique et à la haute fonction publique. Pour cette industrie, planification et monopole sont indispensables – comme quoi ce n’était pas l’apanage de l’ex-URSS.
L’industrie militaire a donc été dopée aux commandes publiques et aux subventions de l’État réellement « providence », comme à l’époque Thomson-CSF ou l’éternel Dassault. Un des principaux volets de cette politique a été la multiplication des programmes nucléaires à usage militaire, menaçant le monde d’un embrasement généralisé.
Ces budgets étaient également nécessaires pour réprimer les peuples en lutte pour leur indépendance : ils ont explosé lors de la guerre de Corée, la guerre du Vietnam ou la guerre d’Algérie. Par exemple, en France en 1953 (date de la guerre de Corée), le budget de l’armée représentait 7,57 % du PIB. Pour les États-Unis, le pic a été atteint pendant la guerre du Vietnam.
Même en l’absence de conflit mondial, l’industrie de l’armement reste un des piliers de l’économie capitaliste, les États sachant très bien planifier pour fabriquer des engins de mort plutôt que pour répondre aux besoins de la population.
Robin Klimt
1 https://fr.statista.com/statistiques/1340721/armee-depenses-pib-france
2 Les États-Unis, en pleine politique de « containment » contre la prétendue expansion du communisme, ont commencé à intervenir massivement au Vietnam en 1965.
Le monde des marchands de mort — Sommaire du dossier
- La guerre ça tue, mais ça leur rapporte !
- Les dépenses militaires dans le monde
- Pour quelques Rafale de plus
- Les « Trente Glorieuses »… pour les marchands de canon
- Travailleurs de l’armement : on nous mène la guerre
- L’armée, planificatrice de la recherche scientifique…
- Le capitalisme porte en lui la guerre