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Maroc : le roi réprime mais les manifestations continuent

« Le roi répond enfin positivement aux revendications », dit l’un. « On essaie plutôt de cacher le soleil avec un tamis », répond un autre. Tel serait le genre de dialogue que l’on trouve sur le site Discord de la Gen Z 212. Il est vrai que les nouvelles promesses du roi d’augmentation des budgets de la santé et l’éducation pour 2026, aussi « mirifiques » que les présente la presse marocaine, ressemblent à un tamis cache-misère.

Des promesses qui ne coûtent rien

Le roi parle de 18 % d’augmentation du budget de la santé par rapport à 2025. Mais il était si bas, les hôpitaux si dégradés, comme l’a montré la mort de huit femmes lors d’accouchements à l’hôpital d’Agadir, à l’origine de la révolte. Même si la promesse, signe que le roi a tout de même eu une sacrée trouille, était respectée, il n’y aurait pas de quoi changer grand-chose : quelque 14 milliards de dirham (1,3 milliard d’euros) de plus que l’an dernier pour les 90 hôpitaux en souffrance. Sans doute moins, quand on sait qu’une bonne partie du budget santé va dans les caisses des cliniques privées de la bourgeoise marocaine. En comparaison, la construction, par Bouygues et Vinci, du plus grand stade du monde à Casablanca, coûtera à elle seule 25 milliards de dirhams.

L’augmentation avancée pour le budget de l’éducation ne va pas plus loin. Le soleil budgétaire brille ailleurs : sur l’armée, entre 79 et 157 milliards de dirhams selon qu’on compte les dépenses fixes prévues ou les autorisations de dépenses. C’est qu’ils coûtent cher, le contrôle du Sahara occidental et la surveillance du mur frontière construit contre les Sahraouis du Front Polisario.
Et ce ne sont pas que la santé et l’éducation qui ont soulevé la jeunesse marocaine : c’est la misère dans le pays, l’absence de boulot, la corruption du régime et du monde des affaires.

1 500 manifestants poursuivis en justice

Tout en tentant d’isoler, par quelques fausses promesses, la jeunesse en colère du reste de la population, le régime réprime toujours. 1 500 manifestants sont poursuivis par la justice, dont un millier placés en détention. 240 ont déjà été condamnés par le tribunal d’Agadir. Près de la moitié écopent de peines de six à quinze ans de prison pour manifestation illégale. Deux soirées de manifestation ont eu lieu les samedi et dimanche 25 et 26 octobre, et de nouveaux appels ont été lancés, pour demander aussi la libération des détenus. La répression pourrait bien se retourner contre le régime.

28 octobre 2025, Olivier Belin