Deux procureurs
Sergeï Loznitsa, avec Alexandre Kuznetsov, Alexandre Filippenko, Anatoli Bely
URSS 1937. Dans la cour de la prison de Briansk, on brûle des milliers de lettres de détenus protestant de leur dévouement à la révolution et dénonçant les mensonges et les tortures du NKVD, la police politique du régime stalinien. Ainsi commence ce film remarquable qui retrace la manière dont, par dizaines de milliers, les militants bolcheviks « anonymes » qui avaient permis à la Révolution de triompher, ont été éliminés par la bureaucratie stalinienne.
Le film n’en parle pas, mais la période 1936-1938, c’était l’époque des procès de Moscou où toute la vieille garde de dirigeants du Parti bolchevik fut condamnée puis exécutée à l’issue de procès spectaculaires. Le grand accusateur étant Andreï Vychinski.
L’action se focalise dans une petite localité, où l’on emprisonne sans procès, dans le silence. Mais une des lettres, écrite par un vieux militant bolchevik, Stipniak, échappe au feu et atterrit sur le bureau d’un tout jeune procureur, Alexandre Kornev. Il finit par rencontrer Stipniak qui lui explique que le NKVD local est un ramassis de contre-révolutionnaires qui sont en train d’exterminer la fine fleur du parti et lui conseille d’aller porter l’affaire directement à Moscou. Kornev part donc pour Moscou où il parvient à rencontrer le procureur général d’URSS, persuadé d’avoir convaincu le patron de la justice soviétique. Qui n’était autre que Vychinski…
Un film magnifique, véritable réquisitoire contre ce que fut la falsification stalinienne et l’extermination de la vieille garde du Parti bolchevik.
Jean-Jacques Franquier
