Nos vies valent plus que leurs profits

Contre leur privatisation capitaliste, nous serons 300 000 et plus !

L’ouverture à la concurrence consiste en réalité à créer un marché commun des travailleurs du transport, où ils seront constamment mis en concurrence les uns avec les autres. Un moyen de pression formidable sur les salaires et les conditions de travail. Cette « harmonisation » est un nivellement par le bas, mais aussi une tentative très politique de mater des travailleurs qui ont été en pointe dans différents mouvements, influençant l’ensemble de la classe ouvrière ces dernières années. Derrière les grands discours, une réalité plus prosaïque : le gouvernement et l’UTP veulent « se faire » les cheminots et agents RATP !

Vous avez dit service public ?

Que ce soit dans l’éducation, la santé ou les transports, les logiques capitalistes d’économies et de productivité prévalent. Le service au public en souffre autant que nos conditions de travail. Défendre une certaine idée du service public, comme une offre de transport gratuite qui garantisse une bonne couverture en toute sécurité à toutes les populations, particulièrement dans les régions et quartiers populaires, c’est se battre contre les directions des entreprises dites « publiques » comme la SNCF ou la RATP qui commanditent et orchestrent la gestion capitaliste et les privatisations.

Face à une offensive contre leurs droits, les travailleurs de la SNCF et de la RATP n’ont aucun intérêt au patriotisme d’entreprise. Il s’agit au contraire de se placer du point de vue de leurs intérêts propres de salariés, de se battre pour refuser tout recul sur leurs conditions de travail et de s’unir pour imposer que s’applique à chacun le meilleur des conventions et statuts existants sur tous les sujets.

Dans ce qu’exprime le graphique ci-dessus, cherchez l’erreur !

À cet égard, l’histoire des luttes des travailleurs du rail est significative. C’est en 1919 que les cheminots décrochent le fameux « statut » unique à l’issue d’une grève nationale menée au coude à coude alors qu’ils sont encore éparpillés dans des dizaines de compagnies privées. La nationalisation de la SNCF, par fusion et grasse indemnisation d’entreprises ferroviaires privées, n’aura lieu qu’en 1937. Et depuis, les effectifs sont en baisse continue face à une augmentation de l’offre de transport ! Voilà le beau travail du « service public » à la sauce capitaliste…

Préparer une riposte unifiée de tous les travailleurs des transports publics

Paradoxalement, l’ouverture à la concurrence pousse l’UTP et le gouvernement à mettre en avant un cadre social harmonisé qui concernera à terme directement plus de 300 000 salariés – sans compter les nombreux sous-traitants qui sont aussi des travailleurs du secteur : nettoyage, restauration ferroviaire, commerces, travaux publics… C’est l’occasion d’engager la riposte à cette échelle. Non pas comme les directions syndicales en se prêtant au jeu pipé des négociations à froid. Mais en rassemblant dans la lutte les travailleurs du secteur de toutes entreprises, publiques ou privées et de tous métiers.

Cela implique de rejeter catégoriquement les formulations corporatistes des revendications. Oui, il s’agit de se battre contre la privatisation de la SNCF et de la RATP, car elle pèserait sur tous les salariés du secteur. Mais le meilleur moyen de le faire est d’entraîner tous les travailleurs des transports, dont la majorité est déjà sous statut contractuel privé, pour des revendications générales et offensives sur les salaires, les plannings, les embauches, etc.

La grève de l’hiver dernier que les cheminots et agents de la RATP ont menée au coude à coude est un point d’appui indéniable. Déjà, on note le succès en octobre d’un rassemblement organisé par Sud-Rail contre la privatisation dans les Hauts-de-France, la relance dans les dépôts de bus RATP du groupe « l’Union fait la force » qui avait travaillé à la mise en place d’une coordination RATP-SNCF l’hiver dernier, la naissance d’un collectif de salariés contre la privatisation regroupant syndiqués de différentes organisations et non syndiqués dans le centre bus de Nanterre.

Samedi 3 octobre s’est tenue à Paris une « réunion des agents des transports publics » [1] qui a regroupé une soixantaine de salariés du routier ou ferroviaire, urbain ou inter-urbain, TransDev, Keolis, Savac, SNCF, RATP, qui ont pu échanger autour de perspectives communes résumées dans un appel qu’ils ont adopté [2]. Une nouvelle réunion est prévue le 7 novembre. Une première occasion d’aller vers l’organisation de la riposte unifiée des travailleurs du secteur.

23 octobre 2020, Myriam Rana
 

 


 

 

Article paru en 2020 dans un dossier Transports publics. Solidarité ouvrière contre concurrence patronale

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