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Élections américaines : l’envers du show

On croyait déjà tout connaître de ce feuilleton : ses acteurs en fin de carrière qui préféreraient mourir sur scène plutôt que de quitter les feux de la rampe, ses dialogues insipides, sa conclusion : c’est toujours les capitalistes qui gagnent. Cette année, le scénario de l’élection présidentielle américaine ménage pourtant quelques rebondissements.

Harris bouscule Trump

Exit Joe Biden, sa vice-présidente Kamala Harris est devenue la candidate des Démocrates, leur redonnant espoir. Le spectacle des conventions des deux partis a confirmé que la dynamique était dans leur camp. Harris a rapidement levé des centaines de millions de dollars, le plus souvent auprès de petits donateurs.
Trump, qui se croyait déjà élu en tant que héros réchappé d’une tentative d’assassinat le 13 juillet, n’est cependant pas battu. Il est soutenu par bien plus de patrons qu’en 2016, notamment du clan de la « tech » autour du milliardaire réactionnaire Elon Musk. Depuis sa défaite en 2020, il n’a cessé de faire campagne en attisant les peurs, le nationalisme et la xénophobie. Il promet d’employer l’armée pour rafler et déporter les immigrés sans papiers, d’élargir l’immunité – et donc l’impunité – des policiers, d’étendre au niveau fédéral toutes les lois limitant l’avortement et de mener la chasse aux programmes scolaires et aux livres qui traitent de la race ou de l’identité de genre.

L’un est le repoussoir de l’autre

Biden vantait ses performances économiques. Mais le taux de chômage réel reste à 9 %, plus du double du chiffre officiel. L’inflation n’a été que ralentie. Depuis 2019, le logement coûte 54 % de plus, l’énergie 61 %, l’alimentation 25 % et l’assurance maladie 22 %. Or, Biden a taillé dans les aides sociales et les crédits pour l’éducation – des milliers d’enseignants ont été licenciés. Jamais les ménages américains n’ont été aussi endettés. Aussi, certains sondages annoncent que Trump pourrait récolter 24 % des votes d’électeurs noirs au lieu de 12 % en 2020, alors qu’il les méprise.

À l’inverse et comme en 2020, l’atout majeur des Démocrates réside dans les craintes que Trump inspire. Outre les cinquante nuances de fascisants qu’il mobilise et ses menaces à peine voilées de mettre au pas tout opposant, il y a cet agenda institutionnel que fabrique pour lui le think tank Heritage Foundation, le « Project 2025 ». Ces 900 pages, avec lesquelles Trump prend ses distances aujourd’hui mais qu’il jurait vouloir mettre en œuvre hier, dessinent un possible basculement autoritaire de l’État fédéral.

Que Trump perde ou pas, l’extrême droite n’a pas fini de peser aux États-Unis. Mais la vraie vie des luttes peut s’imposer : mobilisations de la jeunesse et grèves sur fond d’une minorité syndicale qui se radicalise.

Mathieu Parant

 

(Article paru dans le numéro 18 de Révolutionnaires)