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Fusion des AED et des AESH : une nouvelle attaque contre les personnels les plus précaires !

« Les fonctions des AESH et des assistants d’éducation seront progressivement réformées et regroupées pour créer un métier d’accompagnant à la réussite éducative. » Cette phrase perdue dans les 40 pages du dossier de presse de la dernière Conférence nationale du handicap, tenue par le gouvernement en avril dernier, annonce une attaque majeure contre plus de 180 000 salariés de l’Éducation nationale.

En effet, d’un côté 63 000 assistants d’éducation (AED) surveillent les élèves de collège et lycée en-dehors des heures de cours. De l’autre, environ 120 0001 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), le plus souvent assis en classe juste à côté de l’élève à aider, appuient de l’école primaire au lycée l’inclusion de tous ceux qu’un trouble « dys », ou un handicap plus net comme la surdité, empêche de suivre les cours comme les autres. Sans parler des enfants qu’on « inclut » dans les établissements scolaires alors que leur violence ou leur trouble mental lourd relève d’un encadrement médico-social, en Instituts médico-éducatifs (IME) ou en Instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), où les équipes comptent parfois jusqu’à un adulte par enfant.

En résumé, AED et AESH sont deux métiers – qui s’apprennent aujourd’hui malheureusement bien trop sur le tas ou en se renseignant par soi-même, faute d’une formation digne de ce nom – totalement différents. Alors pourquoi les fusionner ? Pour faire des économies : devenus des « accompagnants à la réussite éducative » (ARE), les AED et AESH seraient interchangeables.
Accompagnés non seulement sur temps scolaire, mais aussi sur temps périscolaire, par 200 000 adultes au lieu de 130 000, les élèves handicapés ne bénéficieraient-ils pas d’un meilleur encadrement ? C’est ce que Macron veut faire gober aux parents. C’est occulter ce fait que les tâches des « pions » leur reviendraient aussi. Avec la fusion, les ex-AESH gagneraient… le droit de surveiller la cantine, les récrés ou la sortie ! Autant dire jouer les bouche-trous. Les ex-AED, eux, iraient passer une heure en classe à côté d’un élève autiste Asperger ou dyslexique entre une colle et une permanence à surveiller. Scolarisant de plus en plus d’enfants handicapés en milieu ordinaire, l’Éducation nationale a institué il y a deux ans la « mutualisation » des AESH sur plusieurs établissements, déjà pour limiter les recrutements. Un AESH peut ainsi soutenir un élève au collège pendant une heure, puis l’heure suivante dans l’école d’à-côté, le lendemain dans le lycée de secteur… Il est prévu que la fusion, au lieu de mettre fin à cette « mutualisation », s’applique aux ex-AED. Et les gosses dans tout ça ? Le gouvernement s’en moque, du moment qu’il peut produire un tableau Excel certifiant à leurs parents qu’ils sont mieux traités que jamais.

Depuis maintenant trois ans, les mobilisations se sont multipliées chez les AED et chez les AESH, avec la mise en place de collectifs et quelques fois de coordinations. Ils revendiquent des augmentations de salaire et un véritable statut de titulaire. Le seul bénéfice de la fusion pour les AED serait d’ailleurs la possibilité de passer en CDI au bout de trois ans, au lieu de six ans aujourd’hui – et encore, c’est aujourd’hui loin d’être le cas pour l’ensemble des AESH. Cependant, la plupart sont des étudiant.e.s qui n’envisagent pas de rester « pions » toute leur vie. Autant dire que cette promesse ne coûtera pas grand-chose au ministère si elle se concrétise dans le décret qui doit bientôt paraître. Pour les AESH, le surcroît de travail issu de la fusion permettrait peut-être de compléter des temps partiels payés à peu près au Smic horaire. Pas de quoi faire affluer les volontaires. À écouter les collègues, c’est plutôt à des démissions que le ministère peut s’attendre !

La fusion des AED et AESH est censée s’échelonner jusqu’en 2027, en commençant dans des académies pilotes dès septembre prochain : il y a urgence à se mobiliser. Aussi l’intersyndicale de l’Éducation appelle les AED et les AESH à la grève dès ce mardi 13 juin. Manière pour les premiers concernés de se compter et de tenter de se faire voir des médias, certes. Mais alors que les attaques se multiplient dans l’Éducation, entre Pacte enseignant ou réforme du lycée professionnel, l’heure n’est pas à segmenter les ripostes, mais au contraire à les unifier.

Aurélien Perenna et Mathieu Parant

 

 


1 AESH : mais combien sont-ils, et surtout elles, au juste ?

Dans son article « Les accompagnants des élèves en situation de handicap, très précaires piliers de l’école inclusive », publié dans Le Monde le 3 mai 2023, la journaliste Eléa Pommiers additionne probablement les 4 000 recrutements promis en 2022 par Macron aux 119 505 AESH comptabilisés par la DRH du ministère de l’Éducation nationale en novembre 2021. Mais le même ministère communiquait à des syndicalistes le chiffre de 118 000 AESH en mai dernier… Cette imprécision dans le recensement de ces agents dit au passage l’absence de considération qui leur est portée. Elle s’explique aussi par la faible rémunération de salariées – la grande majorité des AESH sont des femmes – travaillant à temps partiel imposé avec une paye au Smic horaire, en clair le plus souvent autour de 850 euros nets : 1 000 AESH de plus ou de moins, ça ne se voit pas trop dans les 55 milliards de budget du ministère.