Nos vies valent plus que leurs profits

L’armée, planificatrice de la recherche scientifique…

Dans un ouvrage paru en 1976, La Science et le militaire, le sociologue Georges Menahem écrivait, à propos du scientifique : « Il croit travailler sur les infrarouges et il ne fait que préparer de nouveaux systèmes de détection de missiles ou de guérilleros thaïlandais. Il pense n’étudier que les transformations physiques des radiosources, et il produit des éléments constitutifs d’un système de repérage pour sous-marins. » Le philosophe Michel Serres écrivait quant à lui : « Toute l’utilité du savoir, à peu près, est canalisée vers la mort. »

Cherchez, trouvez, ne vous préoccupez pas des applications, nous nous en chargeons, semblent dire les militaires. Georges Menahem cite un exemple qui, pour être ridicule, n’en est pas moins significatif de cette large « ouverture d’esprit » : l’armée britannique a ainsi financé un congrès consacré… aux baguettes de sourcier ! Sait-on jamais ! De fait, les « labos », dans toutes les disciplines, courent après les financements et l’armée est sans doute un des pourvoyeurs qui laisse le plus la bride sur le cou des chercheurs.

Une liste loin d’être exhaustive des liens entre recherche scientifique et ce qu’on nomme le « complexe militaro-industriel » :

  • Le projet Manhattan, qui a abouti à fabriquer la première bombe atomique, a dopé la connaissance de la structure de la matière.
  • L’IG Farben, au début des années 1930, a développé le caoutchouc synthétique (le Buna-S utilisé pour les pneus des camions militaires).
  • Le GPS a été développé par le département de la Défense des États-Unis, tandis que la recherche porte sur des capteurs quantiques pour s’affranchir de ce GPS pour mieux guider navires, avions… ou missiles.
  • L’Arpanet, réseau conçu par l’agence de recherche du département de la défense américaine, a créé le protocole TCP/IP et donné Internet.
  • Les satellites utilisés pour la météo sont des dérivés des satellites d’observation des armées.
  • Rappelons enfin que l’alliance entre la science et le militaire est chose ancienne, depuis les machines militaires conçues par Archimède au IIIe siècle avant J.-C. au service du tyran de Syracuse jusqu’à l’étude de la trajectoire d’un obus par Galilée au XVIIe siècle.

On est passé des catapultes aux drones kamikazes pilotés par une intelligence artificielle… La science a certes progressé, mais la barbarie est toujours là !

J.-J. F.

 

 


 

 

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