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Palestine

Lors de la 97e cérémonie des Oscars, un prix a été décerné au film israélo-palestinien No other land (Pas d’autre terre) coréalisé par le Palestinien Basel Adra et l’Israélien Yuval Abraham. Il traite de la colonisation israélienne en Cisjordanie vue par ceux qui la subissent. Le film, qui a ému tant le public que le jury, a remporté l’Oscar du meilleur documentaire après avoir été récompensé en 2024 au festival international du film de Berlin. Ce qui a provoqué la fureur de Miki Zohar, ministre israélien de la Culture et membre du Likoud, le parti du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, qui affirme que No other land « déforme l’image d’Israël ». La dénonciation des confiscations de terre, des assassinats de civils, des vergers rasés, des maisons et des voitures brûlées, des arrestations arbitraires et de la violence quotidienne des colons ne déforme en rien a réalité. Elle la décrit parfaitement.

Rima Hassan, élue LFI au Parlement européen, faisait partie d’une délégation européenne officielle devant se rendre dans les territoires palestiniens occupés pour témoigner de la situation sur place. Elle a été refoulée à l’aéroport de Tel-Aviv. Et partant, c’est l’ensemble de la délégation officielle qui a été empêchée de mener à bien sa mission. Le ministre israélien de l’Intérieur a justifié sa position en accusant Rima Hassan, qui est franco-palestinienne, d’agir « de manière régulière pour promouvoir le boycott contre Israël, en plus de ses nombreuses interventions publiques sur les réseaux sociaux et dans des interviews ». En résumé elle est surtout coupable de dénoncer au grand jour la situation d’oppression dans laquelle vit la population palestinienne.

Depuis le lancement de l’opération israélienne contre Gaza, plus de 1 155 membres du personnel médical gazaoui ont été tués et 360 soignants enlevés par les forces israéliennes, dont au moins trois ont été torturés à mort. Pour protester contre cette situation et demander la libération de tous les prisonniers, en particulier celle du Dr Hussam Abu Safiya, directeur de l’hôpital Kamal Adwan à Beit Lahia, dans le nord de Gaza, les « Blouses blanches pour Gaza » organisent un rassemblement aujourd’hui de 14 à 19 heures devant le ministère de la Santé, place Pierre-Laroque, dans le 7e arrondissement. Les manifestants, qui protestent contre le silence complice des autorités françaises dans ce domaine, demanderont à être reçus par le ministre.

Nouvelle escalade israélienne dans le territoire palestinien occupé. Pour la première fois depuis 20 ans et la deuxième Intifada de 2005, l’État sioniste a fait entrer ses chars à Jénine qui ont été accueillis par une pluie de pierres. Dans le même temps, Israël a annoncé avoir expulsé, avec interdiction de rentrer chez eux, des dizaines de milliers de Palestiniens de trois camps de réfugiés du nord de la Cisjordanie occupée. Ces camps sont depuis investis par l’armée. Quant à leurs habitants, ils n’ont nulle part où aller. La déshumanisation continue, en Cisjordanie comme à Gaza.

L’accord de cessez-le-feu entre le Liban et Israël, signé le 27 novembre dernier, prévoyait le départ des forces israéliennes du territoire libanais au plus tard 26 janvier. Puis, à la demande de l’État sioniste, cette date avait repoussé au 18 février. Et finalement le gouvernement Netanyahou a fait savoir qu’au-delà de cette date, son armée conserverait « provisoirement » cinq sites stratégiques dans le pays, en violation de l’accord conclu. Ce n’est pas la première fois, ni la dernière, qu’Israël agit ainsi. Pour l’État sioniste (comme pour beaucoup d’autres d’ailleurs), comme le disait Bismarck, « la force prime le droit ».

À 87 %, les journalistes de la rédaction de la chaîne publique Franceinfo TV ont voté le départ de leur directeur, Laurent Delpech. Ils lui reprochent d’avoir, le 5 février dernier, organisé un débat où les invités discutaient des mérites comparés du plan avancé par Trump de transformer la bande de Gaza en « Côte d’Azur », en déportant deux millions de Palestiniens. Face aux réactions houleuses suscitées par cette émission, la chaîne a reconnu « une faute grave » et a supprimé la séquence. Mais le directeur est toujours là. Rappelons que fin janvier la même chaîne avait suspendu un journaliste pour avoir mis à l’écran un bandeau « 200 otages palestiniens libérés » dans le cadre des échanges entre Israël et le Hamas. Deux poids, deux mesures…

Le docteur Hussam Abu Safiya est un pédiatre qui dirigeait à Gaza l’hôpital Kama Adwan avant son arrestation en décembre dernier par les forces israéliennes après une opération visant l’établissement hospitalier. Il est actuellement détenu dans la prison d’Ofer, en Cisjordanie. Les autorités sionistes viennent de faire savoir qu’il avait été placé dans la catégorie des « combattants illégaux », une législation qui viole les conventions internationales sur les prisonniers de guerre et qui permet de le détenir en prison indéfiniment, sans procès et sans connaître les charges retenues contre lui. Son avocat, qui avait enfin pu le rencontrer cette semaine, a indiqué qu’il a été soumis à la torture et aux mauvais traitements dans les centres de détention israéliens. Ce qui n’étonnera plus personne.

Après plusieurs autres organisations professionnelles, c’est au tour du Comité de protection des journalistes (CPJ) de dresser un sombre tableau des professionnels des médias tués en 2024 dans l’exercice de leur métier. 124 journalistes ou employés de médias ont été abattus dans 18 pays, soit l’année la plus meurtrière depuis 30 ans que l’organisation réalise ce décompte. Sur ce nombre, 82 journalistes palestiniens ont été tués à Gaza et trois journalistes sont morts au Liban, « tous aux mains de l’armée israélienne », rapporte le CPJ. « La guerre à Gaza a un impact sans précédent sur les journalistes et témoigne d’une détérioration majeure des normes mondiales de protection des journalistes dans les zones de conflit », a souligné dans un communiqué la directrice générale de l’organisation basée à New York, Jodie Ginsberg. Et de conclure : « La stratégie consistant à accuser les journalistes de terrorisme sans fournir de preuves est de plus en plus adoptée par les régimes autoritaires comme par les pays prétendument démocratiques. » Bien vu !