Nos vies valent plus que leurs profits

Teisseire : deux mois de grève contre 205 licenciements

Les salariés de Teisseire à Crolles sont en grève depuis le 9 octobre 2025 contre l’annonce de la suppression de 205 emplois, officialisée lors d’un CSE extraordinaire le 16 octobre. Une décision prise par le groupe Carlsberg, géant danois de l’agroalimentaire, qui affiche plus de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires et plus de 1,5 milliard d’euros de profits. Refusant de se laisser sacrifier, les salariés de Teisseire se sont immédiatement mis en grève et ont installé un piquet de grève devant l’usine. Ils se battent depuis plus de deux mois pour la sauvegarde de leurs emplois.

Une mobilisation contre le  PSE

La direction de Teisseire affirme que les licenciements seraient dus aux difficultés économiques du site. Pourtant, de l’argent, il y en a, et 144 millions d’euros ont disparu de la trésorerie après le rachat par le groupe Carlsberg. Ces choix donnent de bonnes raisons aux salariés de n’avoir aucune confiance dans la direction et de revendiquer le contrôle de la comptabilité de l’entreprise, afin de vérifier où vont les bénéfices qu’ils produisent.

Mais pour y parvenir, les tribunaux ne sont pas les meilleurs alliés des salariés

Le procès en cours contre Auchan a montré comment les familles propriétaires de grands groupes, comme la famille Mulliez, peuvent organiser l’opacité comptable, en jouant sur des aspects juridiques et financiers pour faire passer des licenciements alors qu’ils génèrent des milliards de bénéfices. Si ces procédures permettent parfois de freiner temporairement un PSE, elles ne remettent pas en cause le pouvoir qu’ont les patrons de licencier comme bon leur semble.

À Teisseire, la direction a organisé depuis des années le transfert de la production vers Slaur-Sardet, au Havre. C’est une filiale du groupe La Martiniquaise, fondé par la famille Cayard. Jean-Pierre et Édith Cayard, qui détiennent 82,5 % du groupe, figurent parmi les plus grandes fortunes de France, avec une richesse estimée à environ 2 milliards d’euros. Comme quoi, dans ce « pillage » que représentent les fermetures d’usines et délocalisations les patrons français sont loin d’être perdants.

Interdire les licenciements par la grève

Pour interdire les licenciements et vraiment contrôler l’activité de ces groupes, les salariés ne peuvent pas compter sur l’État, tout entier au service des patrons, quelle que soit la couleur politique de ses dirigeants. Ils ne peuvent compter que sur leur propre force. La grève, avec l’implication de tous, et le contrôle direct de ce qui a été vendu, acheté ou produit, sont des armes bien plus efficaces que les tribunaux.

Pour imposer cette transparence, et même reprendre le contrôle de la production, les salariés trouveront des alliés chez les salariés d’autres boites qui licencient à tour de bras : Slaur, ST, Soitec, Poissy, etc. Les grévistes de Teisseire ne sont pas seuls et se mettre en lien, se coordonner permettrait d’élever le rapport de force pour tous. Les nombreux travailleurs attaqués pourraient alors se retourner contre les patrons. Il faut que les salariés prennent conscience de leur force collective, parce que c’est nous qui travaillons, c’est nous qui décidons.

Correspondant