Voitures englouties, renversées, murs et meubles fracassés, arbres tordus, arrachés, balayés par un déluge de boue ; et depuis des jours l’élan de solidarité et les secours, souvent improvisés, qui fouillent les décombres à la recherche de survivants, qui déblayent les rues sinistrées pour rebâtir le plus urgent… les images de la région de Valence (Espagne) peuvent à peine évoquer la violence et le choc subis après les inondations de mardi et mercredi dernier. Avec 200 litres d’eau de pluie par mètre carré, l’énorme vague, qui atteignait un niveau de deux mètres par endroits, a tout emporté sur son passage. Le bilan provisoire s’établissait à 213 morts dimanche matin, alors que 1900 personnes seraient encore portées disparues.
Une catastrophe qui n’avait pourtant rien d’inévitable.
Les responsabilités écrasantes des autorités et du patronat
Bien sûr, rien ne pouvait arrêter la tempête elle-même, aléa climatique à la force exceptionnelle. Mais elle était parfaitement prévue déjà une semaine avant. Comme l’affirme le journal Le Monde : « Les autorités disposaient de toutes les informations pour préparer un plan d’évacuation ou interdire les déplacements non essentiels. » Et pourtant, ni la droite à la tête de la région, ni la gauche à la tête du pays n’ont esquissé le moindre geste. Les messages d’alerte graves ne sont arrivés qu’après que les crues avaient déjà submergé des routes et des villages entiers, piégeant tous ceux qui tentaient de rentrer chez eux.
Il fallait que l’économie tourne ! Certaines entreprises, comme Uber ou Mercadona (une chaine de supermarchés), ont obligé leur personnel à continuer leur travail après le début de la tempête. Combien de vies humaines perdues pour des chiffres d’affaires ?
Il y a un an, à Madrid, la maire de la ville avait lancé un plan d’urgence devant des risques similaires de crues, qui n’avaient finalement pas touché l’agglomération… à quelques kilomètres près. Erreur intolérable pour les syndicats patronaux ! Alors que le réchauffement climatique accélère la fréquence de ces événements extrêmes, que des protocoles devraient anticiper les risques accrus, ce que les politiciens surveillent comme le lait sur le feu, ce sont les jérémiades du patronat et les cours de la Bourse.
La solidarité de ceux d’en bas face à l’incurie et à la calomnie de ceux d’en haut
Alors que la population de la région n’a pas eu accès rapidement au minimum pour survivre, notamment de l’eau et de la nourriture, les pouvoirs publics se sont indignés que certains magasins aient été « pillés »…
En réalité, la population n’a pas attendu les secours officiels pour se débrouiller et organiser la solidarité, par milliers de volontaires. Et il valait mieux ! Car non seulement rien n’a été fait avant la catastrophe, mais les autorités ont attendu plus de trois jours après les crues pour déclencher un plan de mobilisation d’urgence de milliers de pompiers, de policiers et de soldats… dont certains auront sans doute pour tâche, urgente à leurs yeux, de protéger les vitrines des bijoutiers ! Alors quand le roi, la reine d’Espagne et le Premier ministre ont visité la région ce dimanche, pour faire dans l’émotion et tenter de calmer les gens, les habitants les ont accueillis avec des huées méritées et aux cris de « Assassins ! Assassins ! ». Ils ont dû fuir.
Oui, la bourgeoisie et son État ont du sang sur les mains. En temps de crise comme en temps normal, leurs profits passent avant nos vies. Les trésors de solidarité et d’abnégation que les classes populaires déploient dans les pires situations montrent que ce n’est pas une fatalité. Mais pour rebâtir un monde nouveau, à Valence comme partout ailleurs, ce sont les exploiteurs qu’il faudra déblayer de la route.
Éditorial du NPA-Révolutionnaires du 4 novembre 2024