Depuis quelques semaines, articles et reportages se multiplient à propos des règlements de comptes et violences armées qui plongent dans le deuil de trop nombreuses familles de l’agglomération grenobloise. Il s’agit principalement de règlements de comptes entre groupes rivaux qui se livrent une compétition violente pour des parts de marché du trafic de drogue, mais également de faits-divers violents mettant en exergue la circulation des armes à feu.
Dimanche 15 septembre se tenait ainsi une marche blanche réunissant plus d’un millier de personnes en hommage à Lilian Dejean. Cet agent municipal du service propreté, et syndicaliste, avait perdu la vie le dimanche précédent après s’être fait tirer dessus par un chauffard dont il tentait d’empêcher la fuite.
Durant la semaine suivant son décès, ses collègues s’étaient déjà réunis plusieurs fois avant de reprendre le travail le jeudi. Outre les hommages, c’est le manque de reconnaissance et la dureté des conditions de travail – dehors par tous les temps et souvent seuls – que les agents ont voulu mettre en avant. Ces difficultés ont des causes et des responsables, de la loi sur les 1607 heures obligatoires aux coupes budgétaires dans les budgets des collectivités territoriales. Ce sont les mêmes choix qui réduisent à peau de chagrin le nombre d’éducateurs de rue, de salariés de la Protection judiciaire de la jeunesse et de professionnels du médico-social sans lesquels les plus démunis se retrouvent livrés à eux et elles-mêmes.
À droite, plusieurs politiciens ont profité de l’exposition médiatique de ce drame pour faire campagne… sur des thèmes bien différents. Ainsi Alain Carignon, ancien maire de Grenoble, s’en est pris au maire actuel en l’accusant de ne pas suffisamment armer la police municipale et de trop peu investir dans la vidéosurveillance. Comme si augmenter le nombre d’armes en circulation permettait d’en limiter l’usage et comme si la stigmatisation et la répression permettaient d’enrayer une situation qui plonge ses racines dans la misère sociale et le capitalisme.
La violence qui gangrène cette société trouve sa source dans la concurrence féroce que se livrent les capitalistes. Petits ou gros, légaux ou illégaux, c’est par la violence qu’en dernière mesure ils défendent leur droit à exploiter la force de travail d’autrui. Il suffit pour le comprendre d’écouter les politiciens qui, avec le mot rassurant de « sécurité », ne parlent jamais que d’augmenter les moyens, l’arsenal et les lois permettant à la police et à l’armée de se renforcer toujours plus.
S’il n’est jamais question de s’attaquer à la loi du plus fort, c’est parce que le rôle de l’État est précisément de maintenir l’ordre inégalitaire dans lequel est plongée cette société. Quitte à ce que les flics et l’armée fassent eux-mêmes usage de la violence lorsque les choix budgétaires en faveur des plus riches sont contestés par des grèves ou des protestations populaires, ou lorsque les intérêts des capitalistes français sont menacés dans le monde.
Pour cesser de subir les conséquences de cette guerre de tous contre tous, nous, travailleurs et travailleuses, ne pourrons compter que sur notre capacité à réorganiser la société sur les bases de la coopération et de l’égalité.
Correspondants