Ces dernières semaines, Macron a multiplié les déclarations fracassantes sur l’Ukraine. Après avoir par deux fois affirmé que l’envoi de troupes au sol sur le territoire ukrainien n’était pas exclu, il a confirmé le 7 juin dernier l’envoi de Mirages 2000-5 à Kiev, et la formation de 4 500 militaires avec la présence d’instructeurs sur le sol ukrainien. En réponse, l’ambassadeur russe à Paris, Alexander Makogonov, a déclaré que tous les militaires français envoyés « constitueront naturellement une cible légitime pour les forces armées russes ». En réalité, cela fait des mois que des militaires occidentaux opèrent à Kiev ; mais c’est la première fois que la Russie menace aussi ouvertement de les cibler. Emmanuel Macron a cru bon d’utiliser son positionnement offensif face à la Russie dans la campagne des élections européennes, pour se poser comme leader de l’impérialisme au niveau européen, à l’heure où les plus hauts sommets des classes dirigeantes américaines discutent de l’opportunité de poursuivre le soutien à Kiev. On ne peut pas dire que ça lui ait beaucoup réussi !
Les résultats des élections européennes, l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale et les élections législatives anticipées ont perturbé ces calculs et amené un recentrage des différents partis de gauche comme de droite, dont le point commun – en bons défenseurs qu’ils sont tous de l’économie capitaliste – est de défendre en chœur l’armée et les hausses des budgets militaires.
Le RN a toujours eu un penchant pro-Poutine. En 2011, Marine Le Pen clamait son « admiration » pour le président russe. Mais plus la perspective d’arriver au gouvernement se rapproche, plus le RN dit tout et son contraire. Ainsi, le 5 juin dernier, Marine Le Pen vantait à l’antenne de BFMTV « l’énergie » de Volodymyr Zelensky, et confiait « avoir de l’admiration, bien sûr » pour le président ukrainien. Dans la même interview, elle exprimait son opposition à l’envoi d’instructeurs militaires français sur place. Toutefois, elle estimait que « nous devons livrer des armes si elles servent à l’Ukraine à arriver en position de force dans une négociation ». Une position qui ne diffère donc pas vraiment de celle de Macron… surtout en cette période où les troupes de Kiev sont en grande difficulté.
Jordan Bardella, de son côté, affirmait le 28 mars dernier ne pas fermer la porte aux livraisons de missiles Scalp à l’Ukraine, une mesure que Marine Le Pen avait toujours jugée « irresponsable ». Concernant l’Otan, alors que le retrait de la France du commandement intégré figure toujours dans le programme du parti, Bardella s’est prononcé contre, « du moins tant que la guerre en Ukraine est toujours en cours », car, « on ne change pas les traités en période de guerre ».
Du côté du Nouveau Front populaire, ce sont les discours va-t-en guerre sur l’Ukraine du Parti socialiste de Faure et de Glucksmann qui donnent le ton. Le paragraphe du programme du NFP sur l’Ukraine propose de « défendre indéfectiblement la souveraineté et la liberté du peuple ukrainien ainsi que l’intégrité de ses frontières, par la livraison d’armes nécessaires ». S’il s’agit de livrer les « armes nécessaires », alors il faut soutenir l’économie d’armement.
Il y a d’ailleurs un point commun à toutes ces forces politiques : aucune d’entre elles ne prévoit de revenir sur les 413 milliards d’euros promis à l’armée d’ici 2030… comme aux marchands d’armements français qui sont les deuxièmes exportateurs mondiaux. Au détriment des budgets sociaux.
Aurélien Pérenna