Le torchon brûle entre les États-Unis de Trump et une Europe divisée et exclue des négociations pour dépecer l’Ukraine. Le vice-président J.D. Vance, dans un discours incendiaire lors de la conférence pour la sécurité à Munich, a dénoncé les gouvernements actuels de l’Union européenne comme des « menaces contre la liberté d’expression » plus dangereux que la Russie ou la Chine. Pour ce démagogue, la « liberté d’expression » signifie un soutien sans faille aux partis d’extrême droite comme le RN en France ou l’AfD en Allemagne. Le choc politique semble brutal, mais la concurrence capitaliste fait rage depuis des années entre les alliés transatlantiques.
Le 10 février, Donald Trump annonçait 25 % de taxes douanières sur l’aluminium et l’acier. Les 10 et 11 février à Paris, Macron paradait à son sommet de l’intelligence artificielle : 61 pays rassemblés… sauf les États-Unis ! 200 milliards d’investissements promis, dont 50 milliards d’argent public.
La concurrence fait rage entre les grands groupes capitalistes et les États qui les subventionnent. Y compris entre États de la même alliance militaire, l’Otan. Et les institutions de l’Union européenne s’en alarment ! Il faudrait lutter contre le « décrochage » industriel de l’Europe par rapport au géant américain, claironnait il y a quelques mois le rapport Draghi, du nom de l’ancien président de la Banque centrale européenne, puis chef du gouvernement italien (de début 2021 à octobre 2022).
Pour défendre les classes populaires d’Europe ? Bien sûr que non. Comme aux États-Unis, selon Draghi, il faudrait encore augmenter la flexibilité du travail, réduire les réglementations trop contraignantes pour les patrons et les investisseurs (et pourquoi pas revenir aux deux semaines de congés par an, comme aux États-Unis ?). Pour lutter contre l’énergie trop chère, dont le gaz liquéfié américain, il faudrait des éoliennes et du nucléaire, à condition de pouvoir continuer à piller l’uranium d’Afrique. Pour sécuriser l’approvisionnement en minerais rares nécessaires aux batteries et à l’électronique, il faudrait, en plus de piller le Kivu, des mines de lithium dans l’Allier… Il faudrait même augmenter les budgets militaires européens pour que prospèrent « nos » industries de défense ! Et l’économiste réputé de gauche, Piketty, de se féliciter de l’abandon « du dogme de l’austérité budgétaire ». Il n’y a pourtant jamais eu aucun dogmatisme des États bourgeois à accorder des milliards de subventions et de crédits aux entreprises ou à leurs armées et forces de répression. C’est seulement contre les dépenses pour les services publics que s’impose le « dogme » de l’austérité.
Crise économique de 2008, crise du Covid, reconfigurations liées à la guerre en Ukraine, les multinationales européennes et leurs États ont dû trouver de nouveaux terrains d’investissement, et livrer des guerres commerciales dont les travailleurs font les frais. Le géant de la chimie BASF a réduit son activité sur son site historique de Ludwigshafen, en Allemagne, et réalisé le plus gros investissement étranger de son histoire en Chine ; le sidérurgiste ArcelorMittal ferme des sites en France et envisage une expansion en Alabama… Les bourgeoisies du continent s’inquiètent de « l’érosion de long terme de la compétitivité européenne », mais elles y répondent d’abord par une casse sociale violente dont les licenciements de masse : 850 000 emplois dans l’industrie ont été perdus en quatre ans dans l’Union européenne.
R.P.
Sommaire du dossier
- Europe-USA : la guerre commerciale est déclarée — Pas question que les travailleurs payent la facture
- Alliés à la scène, concurrents dans la vie !
- Une Europe forteresse bientôt conquise par l’extrême droite ? Le paradis pour le capital et l’enfer pour les travailleurs migrants !
- Bruits de bottes sur l’Europe
- Concurrence entre capitalistes ? Unité entre travailleurs !