L’économie européenne serait larguée par les États-Unis en plus d’être dépassée par la Chine ? Peut-être. Mais les travailleurs n’ont aucun intérêt commun avec leurs patrons. Les conditions de vie de celles et ceux qui produisent tout ne sont pas déterminées par la réussite de leurs exploiteurs dans la concurrence capitaliste mondiale. C’est même parfois le contraire. Quel travailleur européen revendiquerait le niveau de vie d’un ouvrier chinois ?
Même chez le leader américain, les classes populaires sont loin de nager dans l’opulence. Si l’Américain moyen jouit d’un PIB par habitant 30 % plus élevé qu’en Europe, c’est parce que l’Américain moyen… n’existe pas. La mortalité infantile est deux fois plus élevée aux États-Unis qu’en Allemagne, elle est comparable à celle de la Roumanie. La mortalité maternelle y est deux fois plus élevée qu’en France, comparable à celle du Liban ou de l’Uruguay. L’extrême pauvreté y est trois fois plus courante qu’en France. Le taux d’homicides par armes à feu y est 25 fois plus élevé que dans l’Union européenne. La société américaine est inégalitaire et ségréguée : Noirs et Hispaniques ont deux fois plus de chance d’être pauvres que les Blancs.
Mais inégalités et pauvreté gangrènent tout autant l’Union européenne. Le niveau de vie des travailleurs des pays d’Europe centrale reste toujours largement inférieur à l’Europe de l’Ouest. L’inflation, les licenciements, les bas salaires et la diète des services publics touchent aussi bien la» riche Allemagne que le Portugal ou la Roumanie, où la colère sociale a fait s’effondrer toute confiance dans l’UE, les dernières élections, annulées de manière autoritaire, ayant donné l’avantage à un candidat pro-Poutine !
Nulle part, les travailleurs n’ont intérêt à défendre les intérêts de leurs patrons nationaux. Comme l’écrivait Marx : « l’accumulation de richesse à un pôle signifie l’accumulation, au pôle opposé, de misère, de souffrances, d’esclavage, d’ignorance, d’abrutissement et de dégradation morale. »
Que les bourgeoisies des principales puissances européennes parviennent, ou pas, à s’entendre pour mieux tirer leur épingle du jeu de la concurrence avec la Chine et les États-Unis, dans tous les cas, la note sera présentée aux travailleurs. Il n’y a rien à attendre de quelconques souverainismes et protectionnismes économiques dans le piège desquels sombrent les directions syndicales, ni d’un improbable « Frexit », ni d’une Europe capitaliste plus unifiée et militarisée. Mais tout à gagner à défendre nos intérêts de travailleurs par-delà les frontières et les nationalités, avec nos voisins européens et nos camarades migrants, dans la lutte pour les États-Unis socialistes d’Europe et du monde.
Raphaël Preston
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Sommaire du dossier
- Europe-USA : la guerre commerciale est déclarée — Pas question que les travailleurs payent la facture
- Alliés à la scène, concurrents dans la vie !
- Une Europe forteresse bientôt conquise par l’extrême droite ? Le paradis pour le capital et l’enfer pour les travailleurs migrants !
- Bruits de bottes sur l’Europe
- Concurrence entre capitalistes ? Unité entre travailleurs !