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L’autre moitié du monde, roman de Laurine Roux

Laurine Roux, L’autre moitié du monde, édition Folio (Gallimard), 256 pages – 18 euros

 

 

Dans l’Espagne des années 1930, la marquise Dona Serena et son mari, général monarchiste, règnent d’une main despotique sur le delta de l’Ebre, exploitant sans vergogne les paysans. Leur fils, Carlos, dégénéré et pervers, passe son temps à abuser sexuellement des domestiques employées au château.

Mais dans cette Espagne arriérée, sous le joug de propriétaires terriens féodaux associés à la puissante Église catholique, la colère gronde, et bientôt, les premières révoltes pour l’émancipation sociale éclatent.

C’est dans ce contexte que grandit Toya, jeune ado un peu farouche. Sa mère, Pilar, la cuisinière du château, est régulièrement victime des sévices de Carlos ; son père, Juan, travaille dans les rizières. Un jour, un nouvel instituteur, Horacio, arrive dans le village. Il tient un langage nouveau, parle de syndicats, de lutte contre l’exploitation… Rapidement, la révolte sociale qui grandit dans le pays arrive dans la région, et les paysans font l’expérience de la lutte collective et de la possibilité de se débarrasser de l’oppression.

L’écriture de Laurine Roux, qui a remporté pour ce roman le prix Orange du Livre 2022, est pleine de sensualité et de poésie. À travers sa plume, sans angélisme, on ressent les joies, les peurs, les espoirs et les inquiétudes de ces paysans qui se soulèvent. On découvre l’expérience de la collectivisation des terres, de cette fierté retrouvée des exploités et des opprimés, mais aussi les trahisons de ces dirigeants du mouvement ouvrier, socialistes comme anarchistes, qui se sont attachés au cadavre de la bourgeoisie. Un beau roman.

Aurélien Perenna

 

 

(Article paru dans Révolutionnaires numéro 5, septembre 2023)