D’après un document budgétaire interne rapporté par le Washington Post, Donald Trump envisage de réduire de 40 milliards de dollars le budget du ministère de la Santé. Une offensive historique, qui s’ajoute aux précédentes coupes de Trump dans la santé publique américaine.
Après avoir réduit de près d’un quart les effectifs du ministère, il cible maintenant les programmes d’assurances publiques Medicare et Medicaid. Le Medicare assure les personnes de plus de 65 ans ou souffrant d’incapacités et le Medicaid les personnes aux revenus limités. Sous la présidence Obama, ces dispositifs avaient été complétés par l’Obamacare, qui rendait la couverture santé obligatoire et plafonnait les majorations des tarifs, sans s’attaquer aux assureurs. Ce sont ces déjà maigres dispositifs publics auxquels Trump s’attaque, et s’est déjà attaqué lors de son premier mandat, en réduisant des budgets déjà largement insuffisants.
L’affaire Luiggi Mangione à l’automne dernier avait relancé les débats sur l’injustice du système de santé américain. Les profits mirifiques des compagnies d’assurance de santé privées enrichissent les actionnaires comme ceux d’UnitedHealth qui ont touché près de 15 milliards de dollars en 2023. En parallèle, des millions d’Américains peinent à se couvrir contre les risques quotidiens et l’accès aux soins pour la classe ouvrière est très difficile. À titre d’exemple, autour d’un quart de la population renonce chaque année à se soigner à cause du coût des soins, et c’est sans compter les nombreux et opaques refus de prises en charge de la part des assureurs. Ces réductions de budget vont aggraver la prise en charge des plus fragiles et montrent, une fois de plus et sans grande surprise, que Trump compte laisser la main aux assureurs et entreprises du soin au détriment de la santé de la population américaine.
Hasard du calendrier, l’annonce est tombée pendant la « semaine des infirmières », hommage annuel rendu au personnel hospitalier, qui, cette année, a bien dû faire le constat que pendant qu’on leur distribuait des stylos et des porte-clés3, le gouvernement donnait littéralement des milliards aux groupes d’assurance privés… qui sont justement ceux qui leur imposent des conditions de travail désastreuses et un accès aux soins digne du 19e siècle pour la population.
Car l’impact du dépeçage des bribes de service public de la santé qui subsistaient aux États-Unis est déjà visible dans les services d’urgence du pays. Avec le sabordage de Medicaid et Medicare, ce sont des millions de patients supplémentaires, brutalement privés d’un accès aux soins, qui n’auront d’autre alternative que d’atterrir aux urgences, déjà bondées de patients dont les problèmes de santé auraient pu être prévenus s’ils avaient pu bénéficier d’un suivi médical élémentaire.
Des conséquences dénoncées par le personnel hospitalier, qui va parfois jusqu’à faire grève. C’est le cas par exemple du personnel des services psy des hôpitaux Kaiser de Caroline du Sud, en grève pour obtenir davantage de temps pour suivre les patients, mais aussi pour la revalorisation des retraites et allocations sociales. Leurs journées de mobilisation, soutenue par des patients, dénoncent la responsabilité du groupe d’assurances médicales qui impose des restrictions de soins aux conséquences dramatiques, et fait écho à la colère qui s’exprime contre cette nouvelle attaque de Trump.
Emma Martin