Traduction d’un article du 9 juin 2025 de nos camarades de Speak Out Now
Alors que l’administration Trump continue d’intensifier ses attaques agressives contre les immigrants à travers le pays, les classes populaires sont livrées à elles-mêmes pour se défendre. Alors que les démocrates continuent de se contenter de vaines paroles d’opposition, les manifestations à Los Angeles ont montré que les soi-disant garde-fous de cette administration – les tribunaux, la Constitution, le Congrès – sont inefficaces pour limiter les excès autoritaires de Trump. En réalité, l’intensification des attaques contre les communautés immigrées a clairement démontré qu’il n’existe aucun garde-fou dans leur système. Les seuls garde-fous, c’est nous : les masses organisées de travailleurs qui se lèvent et s’unissent dans nos communautés pour assurer notre sécurité mutuelle.
Ces descentes à Los Angeles font suite à plusieurs semaines d’attaques similaires dans d’autres régions de Californie et à travers le pays. Une semaine plus tôt, une vingtaine d’agents masqués de l’ICE (Immigration and Customs Enforcement)1 vêtus d’équipements tactiques et à bord de véhicules blindés ont débarqué dans un quartier résidentiel du centre-ville de San Diego, en Californie, et ont fait une descente dans un restaurant, arrêtant 19 travailleurs. Les habitants du quartier ont rapidement réagi et ont encerclé les agents et leurs véhicules, manifestant leur mécontentement. Les agents de l’ICE ont tiré des grenades assourdissantes pour disperser la foule et procéder à quelques arrestations. Au cours des dernières semaines, l’ICE a été de plus en plus confrontée à des foules organisées de manifestants dans tout le pays, de Minneapolis à Chicago en passant par l’Ohio, et maintenant à Los Angeles, la deuxième plus grande ville du pays, qui compte l’une des plus importantes populations immigrées.
Avant les descentes sur les lieux de travail vendredi, les agents de l’ICE ont arrêté de nombreux immigrés qui se présentaient volontairement à des comparutions régulières dans les tribunaux de tout l’État, déchirant des familles et arrêtant adultes et enfants.
Tout cela a atteint son paroxysme vendredi dernier, lorsque les agents de l’ICE ont débarqué dans plusieurs quartiers populaires du centre-ville et du centre de Los Angeles, connus pour leur importante population immigrée et leurs lieux de travail qui emploient principalement des travailleurs immigrés. L’ICE a pris pour cible les travailleurs de plusieurs entreprises de confection dans le quartier de la mode, dans les magasins Home Depot, où les journaliers se rassemblent pour chercher du travail, et d’autres entreprises de Los Angeles. Les travailleurs ont souvent été arrêtés et emmenés de force dans des fourgons banalisés sans avertissement ni vérification de leur identité. Selon le Department de Homeland Security2, l’ICE a arrêté 118 personnes rien que la semaine dernière pour des motifs liés à l’immigration. Ces descentes constituaient une provocation claire à l’égard des communautés de Los Angeles, probablement destinée à faire un exemple des communautés qui oseraient résister.
Aucune de ces opérations ne s’est déroulée sans opposition. Des groupes locaux de défense des droits des immigrés ont réagi rapidement, alertant leurs réseaux et réussissant à rassembler des centaines de manifestants sur plusieurs lieux où avaient lieu des descentes d’ICE. Les manifestants s’étaient équipés de mégaphones pour donner des instructions juridiques aux personnes appréhendées par l’ICE, les groupes ont tenté de bloquer les véhicules de l’ICE, mais ont été accueillis avec des gaz lacrymogènes et des grenades de désencerclement.
Plus tard, le vendredi soir, des centaines de manifestants se sont rendus au centre de détention de l’ICE dans le centre-ville de Los Angeles, où bon nombre des personnes arrêtées étaient en cours de procédure d’expulsion accélérée, 200 personnes étant entassées dans un bâtiment conçu pour n’en accueillir que 100. Les centaines de manifestants rassemblés à l’extérieur du centre, scandant « Libérez-les ». Le rassemblement a été déclaré illégal et les manifestants ont été attaqués par la police de Los Angeles, en tenue anti-émeute, avec des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes. À un moment donné, le président du plus grand syndicat de Californie, le Service Employees International Union (SEIU)3, qui se trouvait à proximité, a été plaqué au sol par des agents de l’ICE, arrêté puis envoyé à l’hôpital pour soigner ses blessures. Les manifestations se sont poursuivies toute la nuit, avec des affrontements avec la police, qui a procédé à plus de 100 arrestations.
Samedi matin, des agents militarisés de l’ICE ont été aperçus rassemblés en face d’un autre magasin Home Depot, cette fois dans le quartier ouvrier de Paramount, majoritairement composé d’immigrants et de Noirs, situé dans le sud-est de Los Angeles. Alors que la nouvelle d’une autre rafle se répandait sur les réseaux sociaux, des centaines de manifestants des quartiers voisins ont rapidement commencé à se rassembler, klaxonnant et scandant des slogans à l’encontre des agents de l’ICE, les empêchant ainsi de mener leur opération.
Lorsque les agents de l’ICE ont tenté de partir dans leurs véhicules, brandissant leurs matraques, tirant des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc, ils se sont heurtés à des barricades, des pierres et des bouteilles lancées par des jeunes, en majorité latinos et noirs, qui avaient envahi les rues. Les affrontements se sont poursuivis toute la journée et jusque dans la soirée, s’étendant aux villes voisines, notamment Compton, Long Beach et Inglewood, eux aussi des quartiers populaires à majorité noire et latino. À la fin de la nuit, les forces de l’ordre se sont retirées de certaines de ces zones, sous les cris de rage : « Fuck ICE — Stay out of L.A. ! » (Restez hors de L.A !).
Alors que la nouvelle se répandait et que des images montrant des véhicules des forces de l’ordre détruits, des agents de l’ICE en infériorité numérique et que de nombreux graffitis anti-ICE et anti-Trump circulaient, le président Trump s’est exprimé sur les réseaux sociaux pour dénoncer les manifestations et annoncer l’envoi de 2 000 soldats de la 79e brigade de combat de l’infanterie, la plus grande unité de combat de la garde nationale de Californie. Cela malgré l’opposition ferme et très publique de la maire de Los Angeles, Karen Bass, et du gouverneur de Californie, Gavin Newsom. L’administration Trump a déclaré que la résistance à l’ICE était une insurrection et a une fois de plus repoussé les limites de la loi.
Dimanche, des centaines de soldats armés de la garde nationale ont été aperçus devant les locaux de l’ICE à Los Angeles, pour une nouvelle journée de manifestations et d’affrontements avec la police dans toute la ville. Tout au long de la journée, des centaines de manifestants se sont affrontés avec la police sur une autoroute importante du centre-ville, incendiant un véhicule des forces de l’ordre. Dans d’autres quartiers, les manifestants se sont battus avec la police, ont incendié plusieurs voitures autonomes Waymo (voiture autonome sans conducteur) et ont été confrontés à des tirs de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc, ainsi qu’à des arrestations. Ce fut une journée de résistance généralisée contre la police, qui a rappelé les jours qui ont suivi le meurtre de George Floyd par la police en 2020 et la rébellion de 1992 à Los Angeles après l’acquittement des policiers qui avaient brutalisé Rodney King.
Lundi matin, Trump avait averti à plusieurs reprises qu’il envisageait d’invoquer la loi sur l’insurrection de 1807, qui lui confère des pouvoirs étendus, notamment la possibilité de déployer l’armée, d’instaurer la loi martiale, d’imposer des couvre-feux et de supprimer le droit de manifester. L’administration a déjà envoyé 700 Marines en service actif à Los Angeles, et le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, a menacé d’envoyer d’autres marines depuis une autre base située dans la Californie du Sud. L’ordre de mener ces raids militarisés de l’ICE est désormais devenu le prétexte pour envoyer l’armée à Los Angeles.
Alors que l’administration Trump procède à un transfert flagrant de richesse vers les milliardaires, en réduisant les services sociaux et en supprimant de nombreux départements et programmes qui apportent une aide à la classe ouvrière, elle a intensifié ses attaques très médiatisées contre les immigrés. Il cherche à instrumentaliser ces mobilisations comme un moyen de diviser la classe ouvrière et comme une provocation qui mériterait une réponse plus militarisée. Il répète le mensonge selon lequel les immigrés sont des criminels qui pompent les ressources des communautés. Rien de tout cela n’est vrai. Les immigrés sont des travailleurs, essentiels au fonctionnement quotidien de la société. Ils vivent ici depuis des années, souvent depuis des décennies, travaillant, élevant leurs familles, effectuant souvent les travaux les plus difficiles du pays. Ce sont des grands-parents, des mères, des pères et des enfants. Ce ne sont pas des criminels. Ils et elles font partie de la classe ouvrière.
Ces descentes ne servent qu’à terroriser les communautés immigrées, à intimider les travailleurs immigrés, à accroître leur vulnérabilité et, en fin de compte, à renforcer leur exploitation.
Dans le même temps, l’administration tente de réprimer toute forme de dissidence. Il ne fait aucun doute que la décision de faire appel à des agents armés de l’ICE équipés de véhicules blindés pour mener des descentes très médiatisées – désormais soutenus par la Garde nationale et les Marines – a pour seul but d’effrayer la population afin de la soumettre et de nous faire accepter un état de répression généralisé. Trump a clairement indiqué qu’il souhaitait arrêter, rassembler et expulser les citoyens en plus des immigrés, c’est-à-dire toute personne qui refuse d’accepter ce régime autoritaire flagrant de la classe milliardaire.
Une seule chose fait obstacle à leur programme, nous. Pas le Parti démocrate, ni les politiciens, ni toutes leurs menaces et promesses creuses. Pas les tribunaux avec leurs procès interminables qui finissent par aboutir à rien en appel. Personne ne viendra nous sauver. C’est la classe ouvrière qui est attaquée par cette administration. C’est la classe ouvrière qui a toutes les raisons de se serrer les coudes et de résister à ces attaques. C’est ceux qui font tourner la société – les travailleurs – qui ont le pouvoir de s’unir pour résister à cette offensive de la part de l’État.
Les manifestations de ces derniers jours à Los Angeles ont mis en lumière la violence de ce système. Ces descentes déchirent violemment des familles. Les exploiteurs s’en prennent aux travailleurs qui mènent les vies les plus difficiles de la société. Les attaques se concentrent fréquemment sur des quartiers populaires de zones urbaines négligées, où résident de nombreux jeunes, en majorité noirs et latinos issus de familles immigrées, et confrontés à une précarité croissante, à la terreur policière et à l’oppression d’un système raciste et violent. Mais beaucoup de ces communautés ont déjà résisté et se sont déjà opposées aux forces de l’ordre dans le passé.
Les manifestations de Los Angeles ont montré qu’il était possible de se défendre. Si nous pouvons unir nos forces, rassembler toutes les communautés de la classe ouvrière qui sont attaquées – y compris les attaques contre les immigrés, les personnes transgenres, les Palestiniens, les personnes touchées par les interdictions de voyager, les attaques contre l’éducation, nos soins de santé, nos bibliothèques, etc. – unis, nous pouvons riposter. Alors que les manifestations se poursuivent et s’étendent à d’autres villes, le moment est venu d’unir nos forces et de rassembler toutes nos luttes pour défendre les immigrés. Unis, nous sommes capables de nous rassembler pour défendre les immigrés et refuser la division, unis, nous pouvons faire reculer Trump et tout ce système pourri qui vit de notre exploitation.
1 Service de l’immigration et des douanes
2 Département de la sécurité intérieure
3 Syndicat international des employés du secteur tertiaire.