Les autorités ont décidé d’inscrire Dmitri Mouratov, le rédacteur en chef du journal indépendant Novaïa Gazeta, colauréat du prix Nobel de la paix 2021, sur sa liste des « agents de l’étranger », étiquette infamante utilisée pour étouffer les critiques. Le ministère de la Justice a déclaré que Mouratov avait « utilisé des plateformes étrangères pour diffuser des opinions visant à former une attitude négative à l’égard de la politique étrangère et intérieure de la fédération de Russie ». Ce statut, qui rappelle le qualificatif d’ « ennemi du peuple » de l’époque stalinienne, impose aux personnes visées des contraintes administratives dont un contrôle régulier de leurs sources de financement. Il oblige également d’accompagner toute publication, y compris sur les réseaux sociaux, du label « agent de l’étranger ». Novaïa Gazeta a vu, depuis 2000, six de ses journalistes ou collaborateurs tués, dont la journaliste d’investigation Anna Politkovskaïa, assassinée dans le hall de son immeuble le jour de l’anniversaire de Vladimir Poutine. Une autre de ses journalistes, Elena Milachina, a été hospitalisée en juillet après avoir été passée à tabac. Enfin il y a presque un an jour pour jour, Novaïa Gazeta avait déjà vu, coup sur coup, la licence de la version papier du journal, puis l’autorisation de diffusion sur Internet, révoquées. Malgré tout, Mouratov et son équipe continuent de se battre.