Face à l’offensive patronale, la grève rappelle à nos exploiteurs que c’est nous qui faisons tout tourner.
C’est ce signal que de nombreux cheminots adresseront le 12 décembre, tant à leur patron actuel, la SNCF, qu’aux futurs. Car le 15 décembre prochain, 450 agents du TER de Picardie et 470 de Paca seront transférés dans des entreprises privées : SNCF Voyageurs étoile d’Amiens (SVEA), SNCF Sud Azur, Transdev… Le 1er janvier prochain, 4500 autres cheminots de Fret SNCF seront transférés dans deux filiales, Hexafret et Technis, avec au passage la suppression de 500 postes. Dans un cas comme dans l’autre, les objectifs sont les mêmes : réduire les effectifs, augmenter la charge de travail, parfois au nom de la polyvalence, et mettre la pression vers le bas sur les salaires.
Ces attaques, les travailleurs de nombreuses entreprises privées y font déjà face au quotidien. Des luttes qui ne passent pas inaperçues dans le réchauffement du climat social en cours. De quoi donner tort aux éditorialistes qui voudraient faire passer la grève à la SNCF comme un énième mouvement catégoriel.
L’intersyndicale cheminote avait appelé à une journée de grève isolée le 21 novembre dernier, un « ultimatum » pour sommer direction et gouvernement de suspendre le processus de filialisation. La date coïncidait aussi avec les négociations annuelles obligatoires (NAO). Mais, au nom de l’unité syndicale, les revendications salariales ont été effacées, l’Unsa argumentant que le dialogue social fonctionnerait durant les NAO. Résultat : alors que l’entreprise continue de battre ses records de bénéfices, elle a annoncé 0,5 % d’augmentation salariale, une véritable provocation !
Pour ce qui est du transfert des cheminots aussi, l’unité syndicale nationale s’est vite lézardée. À peine le PDG, Farandou, annonçait-il quelques menues garanties, que l’Unsa et la CFDT levaient l’appel à la grève et dégainaient leur stylo pour signer des accords devant maintenir pendant deux ans les droits sociaux des cheminots transférés dans les filiales voyageurs. La CGT et SUD-Rail ont signé le même type d’accord pour le fret, cette fois pour trois ans. Et si ces derniers maintiennent l’appel à la grève pour le 12, c’est pour réclamer au gouvernement un moratoire sur la filialisation de la SNCF.
Mettre dans la tête des cheminots que leur salut viendra d’autre chose que d’eux-mêmes, en l’occurrence des politiques, parlementaires ou ministres, est une impasse. Les gouvernements qui se sont succédé, de droite comme de gauche, n’ont jamais rien fait pour améliorer le service public ferroviaire ni les conditions de travail des cheminots. En Nouvelle-Aquitaine, ce n’est même pas la droite, mais le PS, membre du NFP, qui organise l’ouverture à la concurrence des TER. Face à ce Monopoly du rail aidé par les politiques, la solution ne pourra venir que des travailleurs du rail eux-mêmes, réunis en assemblées générales de grévistes.
10 décembre 2024, Correspondants