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La journaliste Ariane Lavrilleux traquée par la DGSI : quand une sage pointe la lune, la police prend ses empreintes

Ariane Lavrilleux, journaliste ou terroriste ? Au vu des moyens déployés par la DGSI pour surveiller les faits et gestes de la journaliste de Disclose, on s’y tromperait. Son tort ? En 2021, elle a prouvé le détournement macabre de « Sirli », une mission de renseignement française entamée en février 2016 avec l’Égypte qui devait consister à scruter le désert à la frontière libyenne pour détecter d’éventuelles menaces terroristes. Il s’est avéré que les renseignements français envoyaient des informations au régime égyptien sur des véhicules de trafiquants présumés et celui-ci effectuait des frappes aériennes, provoquant de nombreux morts civils. Disclose estime que les forces françaises sur place auraient été impliquées dans au moins 19 bombardements contre des civils. Malgré cette « dérive » remontée à la hiérarchie de l’armée, la coopération sanguinaire s’était poursuivie. Rappelons que la dictature d’Al-Sissi – que Macron a décoré de la grand-croix de la Légion d’honneur, plus haute distinction française – est l’un des principaux destinataires d’équipements militaires français.

Le gouvernement n’a jamais contesté ces faits. Mais il reproche à Ariane Lavrilleux et ses sources de les avoir rendus publics, invoquant la « compromission du secret de la défense nationale ». Pour cela, elle sera convoquée en janvier pour une mise en examen. Une convocation qui arrive 15 mois après sa première garde à vue de 39 heures et la perquisition de son domicile. Neuf agents des renseignements et des magistrats antiterroristes avaient débarqué chez elle pour aspirer les données de ses téléphones, ordinateurs et clés USB. Depuis, la journaliste est traquée jusqu’au supermarché ou pendant ses vacances, son téléphone est mis sur écoute et ses relevés bancaires épluchés.

10 décembre 2024, Lamine Siout