Le séisme qui a touché la Birmanie est un des plus puissants enregistrés dans la zone depuis des dizaines d’années. À ce jour, le bilan officiel de plus de 1700 victimes va continuer à s’alourdir, sans compter les immenses destructions d’infrastructures : les premiers chiffrages estiment le coût de la catastrophe à plusieurs dizaines de milliards de dollars soit l’équivalent du PIB du pays…
Le chaos et la pauvreté n’ont pas commencé avec le séisme
La puissance du séisme n’explique pas tout. Elle n’explique pas la pénurie de matériel médical ni les coupures d’électricité et d’eau qui étaient déjà récurrentes avant le séisme. Elle n’explique pas l’absence de services de santé dans les zones rurales ni la fragilité des infrastructures et des logements. Certes, le respect de normes antisismiques rigoureuses peut sembler une préoccupation lointaine quand il s’agit déjà d’avoir un toit sur la tête et de trouver de quoi manger au quotidien : avant le séisme, le taux de pauvreté dans le pays atteignait quasiment 50 % et 15 millions de Birmans étaient, selon l’ONU, déjà concernés par le risque de famine…
Dans un monde où les milliardaires à la Musk ou Bezos s’envoient dans l’espace pendant que les camps de réfugiés et les bidonvilles pullulent partout sur la planète, les catastrophes « naturelles » sont sociales : du séisme en Birmanie au cyclone à Mayotte, ce sont les zones et les populations les plus pauvres qui en subissent toujours les plus lourdes conséquences.
Depuis 2021, la guerre de la junte militaire contre le peuple
La pauvreté d’une majorité de la population birmane s’inscrit dans la longue histoire du pillage colonial par la Grande-Bretagne jusqu’en 1948. Depuis l’indépendance, l’histoire du pays est avant tout celle d’une armée qui a organisé le pillage de l’économie et notamment pendant des dizaines d’années pour le plus grand profit de multinationales occidentales, à l’instar de Total.
Revenue au pouvoir en février 2021 par un coup d’État, la junte militaire a réprimé dans le sang les manifestations d’ampleur qui ont alors secoué le pays. Le pays a depuis basculé dans une guerre civile faisant plus de 50 000 morts et deux millions de déplacés. L’armée birmane, en difficulté sur le terrain militaire, affame et bombarde des civils dans les zones « rebelles ». Alors que le séisme venait de détruire une partie du pays, la junte a d’ailleurs continué ses bombardements sur des groupes de l’opposition : un sens des priorités qui en dit long sur cette dictature militaire et ceux qui l’ont nourri. Car si la junte reste arrimée au pouvoir, c’est aussi le fruit de la politique des grandes puissances. Entre la complicité tacite des puissances occidentales pendant des décennies, alors que leurs entreprises pillaient les ressources naturelles et humaines du pays, et le soutien russe et chinois depuis le coup d’État, chacune joue sa partition sur le dos du peuple birman.
1er avril 2025, Boris Leto