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Arkema, pour empêcher les licenciements, les salariés ne pourront compter que sur eux-mêmes


Près de 500 salariés de la chimie ont de nouveau manifesté mercredi 5 février, cette fois-ci contre les 154 licenciements sur le site de Jarrie, annoncés par Arkema le 21 janvier dernier. Prétextant l’arrêt de l’approvisionnement en sel par Vencorex, la direction d’Arkema affirme être contrainte de prendre ces mesures. Pourtant, avec 1,53 milliard d’euros de bénéfices prévus pour l’année 2024, Arkema aurait largement les moyens de maintenir l’emploi et les salaires.

Une mobilisation entamée début novembre

Refusant de se laisser sacrifier, les salariés d’Arkema ont manifesté, fait grève et bloqué la production à plusieurs reprises. Début, novembre, alors que la direction avait annoncé envisager la fermeture des installations sud, quelques jours de grève avaient montré la volonté de nombreux salariés de ne pas se laisser faire. La confirmation de cette perspective par communiqué de presse le 4 décembre, puis l’annonce des licenciements fin janvier, avaient été marqués par une mobilisation de l’ensemble des travailleurs, ceux de la moitié nord craignant d’être les prochains à être visés. Depuis le 21 janvier, une partie des installations ont été arrêtées par les travailleurs et travailleuses. La direction, venue annoncer les mauvaises nouvelles trois jours plus tard, a été reçue comme elle le méritait et a dû fuir la réunion CSE dans le coffre d’un utilitaire. Mais la question de comment les faire remballer le plan de licenciement reste posée.

Nationalisation ou interdiction des licenciements ?

À l’occasion des réunions avec le gouvernement, la nationalisation d’une partie des industries chimiques a été mise en avant comme moyen d’éviter les fermetures et les licenciements. Proposée pour Vencorex dès novembre par Sophie Binet, cette idée s’est pour l’instant heurtée au refus du ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, puis du Premier ministre, François Bayrou. Pourtant, même acceptée par le gouvernement, cette option ne représenterait pas une garantie pour l’emploi. Le licenciement des 162 salariés de Photowatt à Bourgoin-Jallieu, annoncé le 24 janvier par EDF, montre que l’État peut lui aussi licencier et fermer des usines. Au-delà, dans le public, ce sont des centaines de milliers d’emplois qui sont menacés par les coupes du budget 2025. Ce qui permettrait de véritablement empêcher les licenciements, ce serait de prendre sur les 98,2 milliards d’euros versé par le CAC40 à ses actionnaires en 2024. Mais pour un tel programme, les travailleurs ne pourront compter sur aucun gouvernement.

Vencorex, RSA, Framatome… transformer la catastrophe sociale en révolte

Après Vencorex et Arkema, de nouveaux plans de licenciements s’annoncent. Présents au rassemblement du 5 février, les salariés de RSA Rubis, entreprise qui produit de l’aluminium sur la plateforme chimique de Jarrie, partagent l’inquiétude d’être licenciés. Leur activité dépend de celle d’Arkema, de même que celle de Framatome qui a annoncé la mise au chômage partiel de près de 140 salariés à partir d’avril prochain. Catastrophique, l’ampleur de ces licenciements pourrait aussi se révéler dangereuse pour les patrons si la mobilisation parvenait à sortir du « boîte par boîte » prévu et budgété par chaque direction d’entreprise. Des 15 000 salariés menacés de licenciement dans la chimie aux milliers de sous-traitants automobiles en passant par STMicroelectronics qui a annoncé prévoir 3 000 suppressions d’emplois : le nombre des salariés attaqués pourrait se retourner contre les plans du patronat. À condition que les travailleurs et travailleuses prennent conscience de la force que représente le fait de tout faire fonctionner dans cette société, et de pouvoir tout arrêter.

Correspondant