Jeudi 23 février, la manifestation à Rouen a rassemblé 23 000 personnes, c’est l’une des plus grosses depuis la mobilisation contre la réforme des retraites, et même des mouvements sociaux de ces dernières années. Et de nouveau, les cortèges des personnels de l’éducation y étaient présents nombreux et déterminés. D’un côté, la joie d’une telle démonstration de force, de l’autre l’immense tristesse, la profonde colère quand nous avons appris en milieu d’après-midi que notre collègue Doris, AESH au collège Jean Lecanuet de Rouen, avait perdu l’usage de son pouce à cause d’une grenade de désencerclement lancée par la police en bas de la rue Jeanne d’Arc. Pour empêcher des manifestantes et des manifestants de pénétrer en centre-ville, la police était prête à tout. Elle a gazé pendant une heure et demie plusieurs centaines de personnes, tiré des dizaines de fois au flashball et finalement fait usage de grenades de désencerclement, de véritables armes de guerre, avant de charger brutalement la foule et arrêter au moins quatorze personnes, dont un mineur. Un déchainement de violence qui a blessé assez gravement six personnes (points de suture et contusions provoquant des ITT d’une semaine pour certains) et a mutilé Doris.
Le soir même, plus de 700 personnes se sont retrouvées pour une manifestation non déclarée à l’appel de l’intersyndicale qui a condamné unanimement les violences policières et qui va demander au procureur de la République la communication de toutes les images des caméras de vidéosurveillance urbaine pour les besoins de l’enquête, qui est d’ores et déjà ouverte. Le syndicat policier Alliance s’est « étonné » d’une telle blessure et le son de cloche du côté de l’État, c’est que Doris aurait « ramassé » la grenade… Ils sont nés avant la honte, ces gens-là. La grenade a explosé au milieu d’une foule pacifique. Doris, habituée à travailler avec des jeunes adolescents, essayait de convaincre certains de reculer rapidement face à la charge policière. C’est une victime de plus de la violence d’État. On apprenait le lendemain qu’un syndicaliste cheminot avait perdu un œil pour les mêmes raisons dans la manifestation parisienne. Macron a lâché les chiens. Mardi 28, les collègues de Doris défileront en tête de la manifestation à Rouen. Une grande émotion s’est emparée de tous les collègues de l’Éducation nationale et au-delà dans l’agglomération rouennaise.
Pour Doris, et pour toutes les autres victimes, blessées et mutilées par la police pour avoir exercé leur droit fondamental à manifester, continuons plus que jamais le combat jusqu’au retrait de cette réforme dont personne ne veut au sein du monde du travail !
Correspondante