Nos vies valent plus que leurs profits

En Belgique les travailleurs aussi se battent contre leur gouvernement au service des patrons

60 000 (selon la police) à 100 000 personnes (selon les syndicats) ont manifesté à Bruxelles le 13 février contre les politiques d’austérité qui vont être mises en place par le nouveau gouvernement dirigé par la N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie pour Nouvelle alliance flamande) parti de la droite nationaliste flamande, qu’on peut même classer à l’extrême droite, étant alliée au niveau européen à Reconquête d’Éric Zemmour et Sarah Knafo. Les élections avaient eu lieu en Belgique au mois de juin dernier, mais la N-VA vient seulement de réussir à former une coalition gouvernementale, allant du Parti socialiste flamand (Vooruit) au MR (Mouvement rénovateur, droite libérale wallonne). Cette coalition a déjà prévu de s’attaquer à tous les acquis sociaux des travailleurs belges. Au programme de cette alliance nommée « Arizona », on retrouve des mesures d’austérité comme le report de l’âge de la retraite passant de 65 à 66 ans en 2025 puis à 67 en 2030, ainsi que la limitation des allocations chômage, pour l’instant illimitées dans le temps en Belgique, que ce gouvernement voudrait limiter à 24 mois au maximum. L’objectif est clair, « 23 milliards d’économies d’ici 2029 ». Tout en augmentant le budget de l’armée à 2 % du PIB soit 13 milliards d’euros et en voulant retarder l’âge de la retraite des militaires de 56 ans à 67 ans. La politique austéritaire du gouvernement a été dénoncée en bloc par les centrales syndicales belges les plus importantes, la FGTB (socialiste) et la CSC (issue du christianisme social).

La mobilisation nationale était donc appelée par les deux centrales syndicales FGTB et CSC et a gagné la capitale le 13 février pour dénoncer le gouvernement et sa politique anti-ouvrière. Par ces mesures, la coalition Arizona prétend relancer le plein emploi en Belgique. En réalité, il s’agit comme partout ailleurs dans le reste de l’Europe, de précariser les populations les plus exploitées. Rappelons que la Belgique subit elle aussi de grands plans de suppression d’emplois : en septembre 2024, les travailleurs d’Audi à Bruxelles s’étaient en effet mis en grève contre la fermeture de leur usine et avaient réussi à enclencher un petit mouvement autour d’eux, qui avait abouti à une manifestation de 10 000 personnes dans les rues de Bruxelles le 16 septembre dernier. La mobilisation contre le gouvernement belge et ses politiques pro-patronales intervient donc au moment où les travailleurs belges semblent déjà chauffés à blanc.

Cela, les directions syndicales semblent l’avoir compris, appelant à une grève générale pour fin mars. On remarque qu’en France comme en Belgique les bureaucrates sont sensiblement les mêmes. Après un succès comme le 16 février (100 000 personnes en manif en Belgique représentent à peu près un actif sur 30), on pouvait espérer que des directions syndicales conscientes des enjeux auraient plus à dire, et à faire, que « salut, à dans un mois et demi »… De leur point de vue, elles ne vont pourtant pas se tourner les pouces jusqu’au 31 mars, puisqu’elles continuent en ce moment de négocier avec le gouvernement et le patronat dans ce qui s’appelle en Belgique le « groupe des dix » (cinq représentants syndicaux et cinq représentants patronaux). Ainsi, pas de fumée sans feu, au plat pays comme partout ailleurs, si les travailleurs veulent obtenir le retrait de ces attaques, ils vont devoir se battre contre le gouvernement et pour la direction de leur grève sans se contenter des journées saute-mouton et des éternelles négociations des syndicats.

Victor Igla