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Michelin Cholet – La meilleure façon de licencier ? … et de lutter !

Légende : Cholet, 22 janvier 2025 – Tête de cortège avec la banderole du comité de lutte de l’usine Michelin.

 

La lutte contre la fermeture de l’usine de Michelin à Cholet a connu une soudaine accélération jeudi 22 et vendredi 23 janvier : d’une manifestation aux assemblées générales, les travailleurs en lutte s’organisent.

« On n’accepte pas de se faire virer comme ça ! »

Mercredi 22 janvier, plus de 300 salariés de Michelin se sont rassemblés, à l’appel du comité de lutte de l’usine et des syndicats, pour faire entendre leur détermination à lutter contre la fermeture de leur usine. Quelques salariés de Thales, Nicoll (plasturgie) et Charal, où des plans de suppression d’emplois sont aussi annoncés, étaient là en soutien, ainsi qu’une poignée de militants politiques et syndicaux.

Sur une remorque, le porte-parole du comité de lutte prend le micro : « On n’accepte pas de se faire virer comme ça, on veut le maximum, et le maximum Michelin nous le doit ! » Il dénonce aussi les pressions que subissent les salariés des prestataires de Michelin, à qui les patrons d’Onet et Derichebourg proposent des « licenciements pour faute grave » pour ne pas avoir à payer un plan social et des indemnités de licenciement. Les patrons de ces grosses boîtes marchent main dans la main avec Michelin pour virer les salariés en catimini et à moindre coût.

Les travailleurs de Michelin partent ensuite en cortège dans les rues de Cholet, pour se faire voir et dire à la population locale : « on est tout dans le même bateau ! », d’après les mots du porte-parole du comité de lutte. Dans le cortège, beaucoup de discussions : comment convaincre plus de travailleurs de l’usine de rejoindre la lutte ? Comment faire le lien avec les autres boîtes du coin, où les emplois sont aussi menacés ? Des anecdotes aussi, qui en disent long : comme cette salariée, 26 ans chez Michelin, à qui un organisme de formation professionnelle envoie un devis de 18 000 euros pour une formation d’un an (dont le tarif habituel est deux à trois fois moindre). Les indemnités de licenciement et les subventions de France Travail aiguisent les appétits des profiteurs de crise.

La manifestation se disperse en fin de matinée après un appel à continuer la lutte et à une montée massive à Clermont-Ferrand, le 4 février, pour faire pression sur les négociations. Mais tout change en milieu d’après-midi, alors le travail avait repris sur le site. La direction refuse de passer la barre des 40 000 euros d’indemnités lors des négociations au siège de Michelin à Clermont-Ferrand. Tous les syndicats quittent les négociations et une grève sur le tas est décidée à Cholet : l’usine est bloquée, les machines mises à l’arrêt. À l’usine de Vannes, elle aussi menacée de fermeture, et même à celle de Clermont-Ferrand, la colère monte.

Un jeudi d’organisation et des débats d’orientation

Le lendemain, jeudi 23 janvier, l’usine est en arrêt total. Alors que Sud tergiverse, la CFDT bascule dans la grève, à la suite de la CGT et du comité de lutte qui anime le mouvement de bout en bout. Les assemblées de travailleuses et travailleurs grandissent et se multiplient. Depuis l’annonce de la fermeture en novembre 2024, elles étaient espacées dans la semaine, avec des pics de participation à 130. Mais ce jeudi, il y en a eu trois en une seule journée : 150 le matin, plus de 300 le midi et encore 150 l’après-midi. Au menu des discussions : qui décide et avec quels objectifs ? D’un côté l’intersyndicale se croit seule légitime à négocier, à froid, fondant et limitant son action à son poids institutionnel dans le groupe Michelin. De l’autre, le comité de lutte – qui associe syndiqués et non syndiqués – privilégie les décisions par la base, en assemblée, avec une politique pour ancrer la grève dans la boîte mais aussi vers les autres entreprises touchées par cette vague nationale de licenciements.

Contre les licenciements, contre les fermetures d’usine, les travailleurs et travailleuses de Michelin montrent la voie à suivre : s’organiser à la base, décider collectivement et faire monter la pression.

Correspondants